Rois nègres, décomplexez-vous ! Ainsi le Gri-Gri International, version papier, en mars 2008, titrait-il... Profitons de la présence sur le pavé parisien d'une bonne tripotée de ces reptiles, à l'occasion des cérémonies du 14 juillet pour président africains tirailleurs sénégalaids, pour relire un point de vue qui, contrairement à eux, n'a quasiment pas pris une ride.
Vue d'Afrique, comment va la France ? Dans quel état est l'Etat français ? Son pouvoir, ses élites, ses médias ? N'est-il pas temps pour les Africains de regarder la France telle qu'elle est, et non plus telle qu'elle se rêve ? Après Sarkozy, on ne rira plus à Paris des frasques présidentielles africaines. Pris entre un nègre vieille France, Henri Guaino, et un nostalgique de la « Franç’à fric à papa », Claude Guéant, Sarkozy ressemble trait pour trait à la politique africaine de la France. A sa politique étrangère. A sa politique tout court.
La France n'a plus, depuis longtemps, les moyens de ses ambitions passées – de toute façon, à part quelques vieillissants chefs d'Etats africains qui lui doivent ce qu'il leur reste, plus personne ne l'écoute. Elle n'en a même plus le discours. Avec NiCarla, son alignement sur Bush, ses clowneries, ses rencontres humiliantes avec tous les méchants de la terre (justifiées par un pseudo réalisme politique), et ses pénibles déclarations sur l'Afrique ou les Noirs, on finit par se demander si quand il parle, c'est bien encore la France qui s'exprime… La France retirera, dit-il, ses soldats de Côte d'Ivoire (en attendant Djibouti ?). Est-ce un choix économique, stratégique, historique, humaniste ou juste un ordre donné par un Oncle Sam désireux de voir les Gaulois monter enfin au feu… mais ailleurs ?
La France récite ses gammes. Elle dénonce la corruption (entendez, africaine). Mais la pratique elle aussi. Bololo n'est-il pas aujourd'hui au centre de la politique française, comme il l'est en Afrique ? Combien de Balkany noirs ont été montrés du doigt en Afrique, quand le vrai, via la prime à la casserole et l'amitié présidentielle, se prélasse à travers le monde ?
La France dénonce le népotisme africain. Mais au moins les rejetons de présidents afro sont-ils tous ou presque diplômés des plus grandes écoles et universités. Qu'a bien pu étudier le fils de Sarkozy avant d'entrer en politique lors des municipales de Neuilly à 21 ans ?
Bien sûr aussi, la France continue de prôner la démocratie et les droits de l'homme. Un fond de commerce. Une névrose historique. Un tic de langage qui se décline selon les climats. Elle en fait même encore la condition d'une aide au développement ridiculisée par les sommes que les diasporas africaines envoient chaque année aux pays.
Bien avant son discours de Dakar, Sarkozy a un jour déclaré que la France n'avait pas besoin économiquement de l'Afrique. Passons sur l'idiotie ou la malhonnêteté du cliché. Développons-le plutôt… N'était-ce pas une façon indirecte et inconsciente, pour le moins français des présidents gaulois, de dire en creux précisément le contraire ? Que bientôt, et d'où qu'on se place, ce sera au tour de l'Afrique de n'avoir plus besoin du tout de la France ?
Alors, Nègres, il vous reste une chose à faire pour aider la France : bottez-lui le derrière !
Dessin - Mil'Pat Masioni Texte - Samory Touré