Jérôme Reijasse n'a peut-être même pas 40 ans. Supporter du PSG, donc homme déçu. Écrivain (Parc). Journaliste chez Rock'n Folk. Traducteur pour les rockeurs à la télé. Lyrique. Exalté. Capable de trouver des raisons de vivre valables dans un groupe ou un artiste encore incontrôlé. Proposera chaque lundi désormais ses 7 Jours loin du monde aux lecteurs du Gri-Gri.
Canicule...
Une réalité d'abord, un film de Boisset avec Lee Marvin ensuite.
Des gouttes de transpiration, des mouvements limités, des gens zombies qui osent le T-shirt sans manche et la tongue agressive, en plein Paris. Les salauds.
Été, toi qui règne sans partage, suspend ton vol !
Casse-toi !
Cette semaine, je ne vis que dans l'ombre. Loin des rédactions, loin des obligations, dans mon bunker, comme Kadhafi et DSK. L'un va déguster, et l'autre, comme prévu, être innocenté... Drôle de monde, sale époque...
Je commande sur un site de vente en ligne le livre de Charlie Bauer, Fractures d'une Vie. C'est Karim qui me pousse à l'acheter. 1,90 euros. Le prix d'une existence à la marge ?
L'histoire est terrible, dégueulasse, exemplaire. Charlie en prison 25 ans. Charlie expert en QHS, en solitude éternelle. Charlie torturé dans un commissariat marseillais à l'électricité. Charlie qui se fracasse volontairement la tête contre un angle de porte pour croire encore en l'évasion. Charlie qui se branle en cachette en espérant un nouvel enfant. Charlie qui aime sa femme. Charlie qui ment avec un aplomb total aux juges aveuglés. Charlie qui arpente, façon Tintin, la virilité en plus, les petits chemins de la drogue, du Maghreb à la France... Charlie à qui on refuse, quelques mois avant sa libération, d'assister à l'enterrement de son daron. Charlie Bauer. Le livre terminé, on respire. On ne peut s'empêcher de comparer. Est-il possible de résister à autant de saloperie, à autant de silence, de frustration ? Combien d'hommes le peuvent, le pourraient ? Pas moi en tout cas. À la première gifle, je crois que je balancerais le botin. Ma première nuit au cachot serait probablement aussi ma dernière. Un lâche.
À chaque fin de chapitre, je regarde la couverture. On voit Charlie et sa grosse moustache, sa carrure de super-héros tranquille. La force qu'il dégage, la tempête qu'il maîtrise, c'est impressionnant.
Un soir, après une victoire du PSG en terres luxembourgeoises, je décide de regarder le film français Les Aventures de Philibert, Capitaine Puceau. Un flop en salles. C'est tout à fait regrettable. Ce film parodiant avec amour et poésie les films de cape et d'épée raconte les déboires d'un héros naïf, blond et en collants bleu électrique, qui se rêvait planteurs d'artichauts et qui va finalement devoir venger son père, assassiné par un méchant vraiment méchant. Les acteurs sont tous parfaits, même Manu Payet... Astier en chevalier noir insensible en fait des tonnes et c'est heureux. Enfin, Jérémie Rénier, en niais débordant de bravoure, est phénoménal. Il y a des fleurs aux couleurs de rêve, des galères qui rament, des mercenaires allergiques, des femmes gourmandes, des combats épiques et une chanson qu'on a presque envie de connaître par coeur. Je ris, je me dis que c'est ainsi que le cinéma français a le plus de chance d'encore survivre.
Dimanche, le PSG remporte sa première victoire en Ligue 1. 2-1 contre Valenciennes, au Parc. Petit match. Grosse chaleur. Public éteint, public idiot et déjà traître lorsqu'il siffle la sortie de Ménez. Je sens que cette année va être celle de la haine, la vraie, celle qui ne quitte plus jamais le coeur.
Je m'en contenterai.
Texte & Photo - Jérôme Reijasse
Bonus :