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Le Gri-Gri International

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Fernando Redondo for ever (1)

Publié par Gri-Gri International sur 12 Août 2014, 09:15am

Catégories : #Arts & culture

Fernando Redondo
Fernando Redondo

À l'occasion de la coupe du monde 2006 en Allemagne, Les Cahiers du football initiaient un numéro spécial. En dernière page, la rubrique C'était mieux avant, dans laquelle je rendais à Fernando Redondo un des hommages qui lui sont dus.

Après Ronaldinho...

Redondo, pour toujours !


Dans la dernière livraison des Cahiers, le nostalgique donneur de leçons en a reçu une bonne. Merci M.Hitzel (m’étais promis de faire figurer ton nom, ô Redondien !). Dans le papier sur la finale du Mundial 1978, j’ai situé le match à la Bonbonnière, alors qu’elle eut lieu au stade « Monumental ». Le monsieur nous envoie un petit mail correctif. Je lui réponds en m’excusant. Échange plaisant. Stimulant (un bon journal a de bons lecteurs).

Intuition ? Inconscients connectés magiquement ? Dommages collatéraux d’un esthétisme, forcément, excessif, allez savoir… Ce n’est pas seulement sous le charme de l’Argentine et confits en dévotion devant Saint-Diego que nous sommes. Nous avons bien, certes, un petit différend concernant Gaby Heinze. Il l’a regardé jouer à Old Trafford et voit en lui une « brute épaisse »… Moi, n’allant plus au Parc depuis... depuis très longtemps, Gaby, je ne l’aurais vu que dans ma télé. Mais qu’on ne compte pas sur moi pour dégoiser sur le plus hallucinant obteneur de coup francs suite à feintes de frappe douteuses et balancements de l’arrière-train façon actrice X !

Bref, au détour d’une phrase, M.Hitzel lâche un nom… Fernando Redondo !

Le mètre étalon de la classe et de l’élégance (sportive, physique et morale). Le fils de grand bourgeois destiné au polo (j’ignorais ce détail, sénor Hitzel, je recycle direct), qui sut risquer la rupture pour imposer le foot aux siens, et ensuite le sien de football au monde et à l’Argentine.

Comment ne pas succomber devant un joueur qui refuse la sélection si pour être sélectionné il faut se couper les cheveux…

Redondo : le lieu géométrique où se rejoignent les parallèles les plus belles. De l’Antonioni seventies au Rui Costa fin de siècle, tout ce qui a porté beau dans le ballon a eu un petit quelque chose de Redondo. Soyons solennel, tant qu’il y aura des Redondo, la vie vaudra d’être vécue (où est le prochain, vite, on commence à manquer d’air !)

De 1985 à 1990, Fernando fait les beaux jours d’Argentinos Junior (si je retrouve celui à qui j’ai prêté mon exemplaire de l’autobiographie de Diego, je vous ressors les phrases que le Pibe a pour lui…) (1). De 90 à 94, c’est sous le maillot de Tenerife que Redondo promène sa grâce faussement désinvolte, cet air de joueur de tennis yougo prêt à balancer une demi-finale du grand chelem à la première double faute... mais également, comme il le fera à Milan, à refuser de percevoir son salaire en raison d’une longue blessure (Milan ne sera pas ingrat). Au-delà même du côté fric de l’affaire, il y a dans ce geste une offrande faite au Malin, un rayon d’humanité posé aux pieds de la Bourse, l’espoir secret un peu ridicule de convertir le Caïman... Une foi absolue presque bête, qui vient utilement nous rappeler que ce qui fait la valeur d’un don, c’est son coût.

Avant de quitter un Real inconsolable, Redondo, l’espace d’un dribble, un soir, le 19 avril 2000, en quarts de finale de la Ligue des Champions, face à Manchester United, sur l’aile gauche, devint, pour toute une génération d’adeptes du Dribble contre le But, mieux qu’une icône, mieux qu’une relique à adorer : l’Incarnation d’une certaine façon d’être, prétendument incompatible avec le haut niveau, ses enjeux et ses impératifs.

Ce dribble, irréel de simplicité, impensable d’apparente facilité, évident de fluidité, cette grande, immense, gigantesque, talonnade dans le dos de l’ombre du défenseur mancunien (avant une passe plus que décisive à Raul) est à jamais gravée dans les plus sélectives mémoires : celle de M.Hitzel et la mienne.Redondo, reviens. Sans toi, le foot n’est plus qu’un sport.

Texte / Grégory Protche (in Les Cahiers du Football)

PS (de l'époque, ndlr) : si parmi vous, lecteurs des Cahiers, se trouvent des possesseurs de copies de matches de Redondo, contactez-moi. Je me fais fort de convaincre le Soviet rédactionnel de lui consacrer bien plus qu’une nostalgique rubrique.

PS 2 (d'aujourd'hui) :

J'ai depuis réacquis l'indispensable ouvrage. Redondo y est abondamment cité. Notamment suite à une polémique entre les deux hommes, au début des années 1990. Redondo, désireux de poursuivre ses études, avait pour un temps renoncé à la sélection nationale. Puis s'était fait photographier par un grand journal des livres à la main devant une université. Ce qui avait gravement irrité Maradona, qui y vit une attaque personnelle. "Pour moi, tous ceux qui posent avec des livres et me font passer pour un ignorant sont des fils de pute. Sans se démonter, Redondo s'excusa d'avoir été mal compris et Diego le laissa développer ses arguments, non sans conclure que personne n'avait le droit de le faire passer pour un ignorant. L'affaire en resta là.

En 1994, lors des deux premiers matches de poule, les deux, plus complices que jamais, animaient le milieu de terrain d'une des plus puissantes équipes argentines jamais vues.

Puis le numéro 10 est accusé de dopage, évincé de la compétition. Etc.

L'Argentine qualifiée affronte la Bulgarie ensuite. Dans son livre, Diego retient ces mots prononcés à l'issue du match par l'orphelin Redondo :

"Je te cherchais sur le terrain et je ne te trouvais pas... Pendant tout le match, je t'ai cherché."

Enfin, dans son classements des 100 joueurs sur lesquels il a quelque chose d'important à dire (quelle merveilleuse idée éditoriale), voici ce qu'il écrit :

"51. Fernando Redondo : nous sommes différents en dehors des terrains, mais on s'est entendus à merveille lors du Mondial. Entre ses longues jambes et les miennes plus courte, le ballon circulait bien."

Bonus : le grand pont-talonnade génial contre Manchester United

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