La réouverture hypermédiatisée de la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA), hors service depuis mars 2011, a remis sur le tapis un sujet qui dérange profondément le camp Ouattara – parce qu’il montre à quel point il est capable d’irresponsabilité pour arriver à ses fins. Dans quelles conditions les 6 000 pensionnaires de cet établissement pénitentiaire se sont-ils retrouvés dehors, ce qui a concouru à semer une insécurité qui pèse toujours sur le quotidien des Abidjanais ? En réalité, les choses sont claires. Les témoignages des pensionnaires de la MACA aussi. Les prisonniers ont été libérés par les forces pro-Ouattara, et ceux qui se sont portés volontaires parmi eux ont été armés, après un entraînement sommaire à Abobo. Dans un entretien accordé à Jeune Afrique avant son assassinat, Ibrahim Coulibaly dit « IB » a reconnu avoir « libéré des prisonniers », notamment dans le but de « récupérer deux de mes hommes emprisonnés depuis plusieurs années ». Dans le même entretien, il confirme avoir des contacts réguliers avec Alassane Ouattara et son épouse. Dans une vidéo qui a fait le buzz sur Internet, le commandant Issiaka Ouattara dit « Wattao » reconnaît très clairement avoir recruté des ex-prisonniers pour faire la guerre, et menace de les renvoyer à la MACA ou six pieds sous terre s’ils ne changent pas leurs mauvaises manières. Malgré la crudité des faits, l’AFP et RFI tentent de réécrire l’Histoire récente de la Côte d’Ivoire, pour donner une meilleure image à l’international à un régime installé par l’Etat français, dont ces médias sont l’émanation. Ainsi l’AFP parle de « l’évasion fin mars » de tous les pensionnaires de la MACA, au « premier jour de la bataille qui fut le sommet de la crise post-électorale. » Il n’y a pourtant pas eu évasion mais ouverture des prisons par les forces pro-Ouattara, selon le mode opératoire qui a prévalu dans quasiment tout le Sud du pays au fur et à mesure de la progression des FRCI, et qui avait déjà été expérimenté en septembre 2002 dès le lancement de la rébellion. RFI va beaucoup plus loin, et se fourvoie dans un mensonge grossier, qui relativise les grandes considérations sur la presse africaine « non professionnelle » et les médias occidentaux exemplaires. Dans son journal de 7 heures 30 minutes, le présentateur Sébastien Jédor affirme de manière péremptoire que « des pro-Gbagbo auraient [on remarquera le conditionnel insidieux] ouvert les portes et tous les prisonniers se sont évadés ». Leçon du jour : à force de diaboliser, on finit par se ridiculiser.
Photo - Le Nouveau Courrier Texte - Benjamin Silue
PS : in Le Nouveau Courrier n°294
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