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Le Gri-Gri International

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Princess Erika pas chamboulée par le bazar "black" de Mabanckou

Publié par Gri-Gri International sur 22 Avril 2009, 12:00pm

Catégories : #Le feuilleton littéraire de Princess Erika


J’aime vraiment bien Alain Mabanckou. Quand je le vois à la télé, il est toujours bien habillé, petite casquette, belle chemise et veston de cuir, l’air vif avec son sourire, au coin des lèvres, pourtant doux. Le genre que les intellectuels blancs apprécient. Parce qu’il est « truculent », « cocasse », pratique « à merveille l’auto dérision », et que c’est avec « verve » qu’il nous dépeint, patati patata… Il a été maintes fois récompensé et Black Bazar ne devrait pas déroger à la règle.

 

Je me demande si Alain aime boire… non je crois que je sais, de source sûre. Le bar est un lieu sacré chez lui. Son « Fessologue », sapeur émérite et héros du roman, passe la plupart de son temps au Jip’s, bar afro-cubain des Halles. Il n’en sort que pour écrire pratiquement. Assis dans le parc, sa machine à écrire sur les genoux, quand l’appartement, trop vide depuis le départ de sa compagne et de sa fille, se remplit de souvenirs malgré lui.

Départ en compagnie de « l’Hybride », faux musicien qui ne connaît rien à la sape et vrai causeur du trou de la sécu, lui. Son voisin « Hippocrate », martiniquais, ne sait pas qu’il est noir. Locataire, il se conduit en proprio, l’épie et l’apostrophe dès son arrivée avec sa femme dans l’immeuble… Il est plein de reproches pour ces Africains venus manger le pain des bons Français. Nul en géopolitique, il confond Mobutu, Sassou, petit et grand Congo…« Blonde de neige », appellation incontrôlée, vestige d’une jeunesse passée à Pointe Noire, ou « Couleur d’origine », à cause de sa peau très foncée, dotée d’une face B à vitesse automatique ? La plupart de ses potes de bar, Yves l’Ivoirien surtout, lui conseillerait plutôt une fille "qui ferait payer à la France la dette coloniale". Vladimir le Camerounais aux longs cigares remarque que faire des exercices pour entretenir la bonne taille de son engin serait salutaire, s’il veut satisfaire sa belle.

Je me demande si Alain croit à la supériorité des nés là-bas sur les nés ici…

 

« Couleur d’origine », sa compagne, est née à Nancy et ne comprend pas grand-chose aux histoires de Congolais, déteste aller dans leurs fêtes (à son grand soulagement), mais adore qu’il lui raconte des « histoires pays » pour l’endormir. Une vraie petite Française. Elle l’invite à « l’Équateur » pour lui annoncer qu’elle est enceinte et hurle quand il lui propose de déménager en banlieue. Fier de sa toute nouvelle paternité, il débarque au Jip’s, pour présenter la petite aux potes. Roger, le Fanco-Ivoirien, doute : « Attends un peu Fessologue, c’est ça ton enfant en question ? » Un autre raille son prénom, Henriette, il ne l’emmènera plus.

Son Arabe du coin est un vrai révolutionnaire, panafricaniste. Il réfute la thèse d’un esclavagisme arabe sur les noirs et prône « l’unité africaine du Guide éclairé Mouammar Kadhafi ». C’est la caution politique du livre et Fessologue n’ose pas lui avouer que sa femme est partie au pays… avec ce joueur de tam-tam en plus !!! Contrairement à Elie Domota, Fessologue estime que le temps du tam-tam est révolu. C’était avant qu’on ne sache faire autrement. Louis-Philippe, réel écrivain haïtien, mentor du délaissé, surveille notre romancier en herbe : « On n’écrit pas par revanche, ta colère doit être maîtrisée, contenue pour que ta prose coule d’elle-même. » Et pour parfaire ce tableau prévisible quoi de mieux qu’une petite amie blanche peintre qui lui trouve une ressemblance avec Miles Davis ?


C’est peut-être ce qui m’a manqué… Moins de saccades attendues et plus d’aspérités involontaires… Je me demande si Alain n’a pas un peu forcé le trait pour rendre son Black Bazar plus pittoresque encore. Comme embusqué derrière un arbre de la forêt équatoriale, prêt à sauter à la gueule du lecteur occidental tranquillement installé devant sa bière.

 

Princess Erika

Black bazar est un roman écrit par Alain Mabanckou et publié par les éditions du Seuil en 2009, à Paris.
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