Il s'appelait Philippe Rémond. Il enseignait et vivait en Côte d'Ivoire (à Polytechnique, à Yamoussoukro, pour être précis).
Il était le fils d'une adjudante en retraite de l'armée de l'air française.
Il avait vécu suffisamment longtemps en Côte d'Ivoire - comme coopérant, puis à titre personnel - pour que, à notre connaissance - et face à l'absence d'information à son sujet, "notre connaissance" devra malheureusement suffire -, la nationalité ivoirienne lui ait été octroyé.
En 2004, représentant de l'association des ressortissants européens pour la Côte d'Ivoire, pendant les "évènements" et les catastrophiques interventions militaires françaises, il apparut à la RTI. Formidable d'honnêteté. Cinglant. Emu. Déterminé.
Nous le découvrîmes pour la plupart à la faveur de la crise postélectorale ivoirienne fin 2010-début 2011. Lors d'un nouveau passage à la RTI, dans l'émission Raison d'état. En 2004, les réseaux sociaux étant encore une abstraction, les Ivoiriens seuls ou presque avaient vu et écouté Philippe Rémond. En 2011, ses interventions circulèrent énormément sur facebook. Et ne contribuèrent pas peu à l'idée qu'il y avait aussi des Français honnêtes en Côte d'Ivoire. Qu'on pouvait penser plus loin que son appartenance.
Le 30 mars 2011, Philippe Rémond a été assassiné, exécuté, dans une chambre d'hôtel de Yamoussoukro, alors qu'il venait juste de consentir à quitter sa résidence jugée trop identifiée et par là dangereuse pour lui dont les convictions progressistes étaient notoires. Sa mort fut d'abord présentée comme le produit accidentel d'un cambriolage qui aurait mal tourné, quelque chose comme ça - I Télé employait le terme "crapuleux".
Les troupes légalistes étant concentrées et regroupées pour des raisons stratégiques autour d'Abidjan à cette période, Yamoussoukro était alors sous la coupe des rebelles de Ouattara dirigés par Soro. Est-ce un d'entre eux qui a perpétré ce crime ? Impossible de le savoir, aucune enquête n'ayant été initiée. Aussi énorme, incroyable que cela pût paraître, personne n'a investigué ou effectué de recherches autour de l'assassinat du Français Philippe Rémond en Côte d'Ivoire...
Nous avons appris ce matin (6/9/16) qu'à la suite de son ministre des Affaires étrangères, le Premier ministre français, Manuel Valls, s'inquiétait du sort de "Français" au Gabon dont on serait sans nouvelles.
Et dont on ne connaît pas les identités... ce qui rend d'avance les recherches difficiles !!!
Certains, sur les réseaux sociaux, voient dans ces annonces françaises "alarmistes" les signaux d'une prochaine intervention militaire qui aurait pour alibi de "sauver" ou "protéger" ces Français au Gabon... et permettrait, à l'ancienne, de déposer Ali Bongo.
Nous n'irons bien sûr pas aussi loin, et nous contenterons, à la faveur des ces pénibles disparitions de Français au Gabon, de demander au Premier ministre de la France ce qu'il compte répondre à ceux qui se demandent pourquoi la France se fout à ce point du sort d'un de ses enfants, Philippe Rémond ?
Texte : Grégory Protche