La reprise du procès l’ex première dame Simone Gbagbo devant la Cour d’assises d’Abidjan le lundi 20 juin 2016 a coïncidé avec le 67ème anniversaire de cette dernière. Ce fut donc l’occasion pour ses partisans venus la soutenir de lui souhaiter joyeux anniversaire. Très émue, Simone Gbagbo, très élégamment vêtue d’une robe fleurie rouge-blanc, la tête nouée d’un foulard assorti, a laissé couler quelques larmes.
Rappelons que Mme Gbagbo comparaît pour sa supposée implication dans des tirs d’obus sur le marché d’Abobo, dans la répression sanglante d'une manifestation de femmes d’Abobo et pour sa participation à une cellule de crise qui planifiait et organisait des attaques, à travers des milices et des forces armées proche du régime Gbagbo.
Ci-dessous des extraits des échanges entre l’avocat de la partie civile et madame Simone Gbagbo.
L’avocat de la partie civile
Elle a appelé à résister contre le diable et le chef bandit à un meeting. Le chef bandit c’est Alassane et le diable c’est M Sarkozy. Dans les films de cow-boy, on doit battre à mort le chef bandit. N’est ce pas une façon d’appeler à des tueries ?
Simone Gbagbo
J’ai fait un meeting au Palais de la culture. J’ai dit le chef bandit, monsieur le juge, c’est lui-même (elle parle de l’avocat de la partie civile) qui déclare Alassane Ouattara le Chef Bandit et Sarkozy le diable. Je n’ai dit le nom de personne. J’ai prononcé ces mots, mais pas le nom d’Alassane. C’est lui qui nous informe que c’est Ouattara le chef Bandit.
L’avocat de la partie civile
Qui est le chef bandit alors ?
Simone Gbagbo
J’ai utilisé des images pour un meeting, on est pas ici pour faire les commentaires d’un meeting. On n’est pas là pour l’interprétation des mes meetings. Si c’est le cas, monsieur le juge, qu’il envoie tout le meeting.
Le juge
Répondez à la question.
Simone Gbagbo
Je ne réponds pas à cette question. Envoyez tout le meeting pour les commentaires. Pourquoi il envoie une petite partie?
Le juge
C’est moi la police de l’audience. C’est moi qui pose les questions.
Simone Gbagbo
C’est moi aussi qui répond aux question.
Les avocats de la défense
Elle a déjà répondu. Car la même question a été posée plusieurs fois. C’est à force d'insister sous plusieurs formes qu’elle a dit cela. Elle dit qu’elle n’a pas dit le nom de monsieur Ouattara. C’est une réponse M le juge.
L’avocat de la partie civile
Qui est le le chef bandit qui est le diable ?
Simone Gbagbo
Le diable c’est le diable, le chef bandit est le chef bandit.
L’avocat de la partie civile
La presse a commenté et a dit que le diable c’est Sarkozy puis le chef bandit c’est monsieur Alassane.
Le juge
Ce sont les commentaires d’un journal ?
L’avocat de la partie civile
Oui du journal Le Mandat.
Simone Gbagbo
Le journaliste est responsable de ses commentaires.
Le Procureur
Le même document parle de l’éradication de la presse.
Simone Gbagbo
Monsieur le président, ce document c’est lui (l’avocat de la partie civile) qui l’a écrit. Lui-même.
L’avocat de la partie civile
Un autre document parle du plan de sortie de crise adressé à la Première dame. Ce document parle d’une armée venant d’Angola pour nettoyer la rébellion. Qu’est ce que l’accusée en pense ?
Simone Gbagbo
C’est la police judiciaire qui m’informe de ce document.
L’avocat de la partie civile
Le 11 janvier des militants du RDR ont été assassinés à leur siège à Yopougon. Elle a en connaissance ?
Simone Gbagbo
Je n’en sais rien. Je ne crois pas.
L’avocat de la partie civile
Son père était un homme de guerre, selon elle, est-ce que elle ne se sentait pas guerrière pour nettoyer la rébellion ?
Simone Gbagbo
Mon père était gendarmes, mais je n’aime pas les armes. Je mène mon combat avec la bouche. Je n’ai pas une âme de guerrière. Voilà pourquoi je suis députée. Sinon j’allais me faire recruter dans l’armée. Je n’ai envoyé personne faire la guerre. J’ai appelé à la résistance ! Et j’appellerai toujours à la résistance. Ceux qui doivent répondre civilement le font, les militaires aussi font leur travail.
Le juge
Il y a eu des réactions violentes de ceux que vous avez appelés à la résistance. Vous avez appelé les patriote à la résistance.
L’avocat de la partie civile
Le document dit que les femmes et tous les Ivoiriens doivent s’insérer dans les équipes pour faire la guérilla.
Simone Gbagbo
Mme le juge, plus il (ndlr: l’avocat de la partie civile) brandit ce document, plus je me dis que c’est lui même qui l’a produit. La guérilla à Abobo c’est le commando invisible. Le commando invisible c’est Ouattara. C’est Soro. Cherchons les vrais auteurs de ce document. Monsieur le président peut être que c’est lui (ndlr: l’avocat de la partie civile) même qui est l’auteur de ce document.
Le juge
Est ce que l’appel aux femmes pour alimenter Abidjan n’a pas servi à l'approvisionnement des cellules de guerre ?
Simone Gbagbo
C’est trop facile de faire des affirmations sans preuve. Arrêtez de me fatiguer !
Question complémentaire de la rédaction du Gri-Gri : est-ce qu'au lieu d'entretenir un douteux débat autour de la mort des femmes d'Abobo (au risque de se faire débilement traiter de révisionniste, un comble !), la Défense de Laurent Gbagbo devant la CPI ne ferait pas mieux d'enquêter (elle n'est pas totalement démunie de moyens et, sur place, nul doute qu'elle trouverait des énergies et des bras valides) sérieusement sur ces mortes...? Le livre de Leslie Varenne démontre que ce ne sont pas les armes des Forces de défense et de sécurité (FDS), alors fidèles à Laurent Gbagbo qui ont tué les femmes d'Abobo... alors qui ? Qui les a envoyées manifester en leur faisant croire que leur manifestation serait sécurisée (elle ne le fut évidemment pas) ? Qui porte les responsabilités directe et indirecte (tireurs et donneurs d'ordre) de ces assassinats ?
Généralement, à la suite d'un crime, on se demande immédiatement à qui ce crime profite... difficile d'affirmer qu'il aura servi Laurent et Simone Gbagbo.