
Le 14 septembre dernier (2007, ndlr), le Mollah Omar a convoqué diplomates, ONGs, parlementaires, membres du gouvernement... Pour « une communication très importante ». Dans cette belle démocratie qu’est le Gabon, où l’information et les médias sont solidement encadrés, il n’en fallait pas plus pour alimenter rumeurs et spéculations plus ou moins farfelues. Au point que les populations – pourtant habituées aux effets d’annonce de la bande à Bongo – ont joué, la veille, à se faire peur (ou plaisir) en subodorant une démission du « Chef ». Douce hérésie. La montagne de la cité de la Démocratie a accouché d’une souris : le président à vie du Gabon était juste venu annoncer à la face du monde qu’il avait enfin trouvé la recette miracle pour sortir son pays du sous-développement. Alléluia ! Grâce à la mise en exploitation « prochaine » des mines de fer de Bélinga (Nord-Est), il allait pouvoir réaliser tout ce qu’il n’avait pas réussi à faire en 40 ans avec le pétrole (qui flambe à plus de 80 dollars le baril), le manganèse, l’uranium, le bois… Le Gabon allait enfin disposer d’infrastructures (autoroutes, écoles, universités, hôpitaux) dignes de son rang d’émirat tropical. Des emplois aussi, par milliers, étaient annoncés. Effets d’annonce. Encore et toujours.
Les Gabonais, ces gros bêtas, ne sont plus dupes. Quand le Mollah et ses talibans parlent, plus personne ne les écoute. Quand ils viennent fanfaronner à la télé, on zappe. Par réflexe. Ou hygiène de vie. Car les citoyens qui – dans leur immense majorité – vivent comme des primitifs dans un pays scandaleusement riche, sont persuadés que, de l’exploitation des mines de fer de Bélinga, ils n’auront que les inconvénients : pollution et destruction des écosystèmes. Comme avec le pétrole de Shell à Port-Gentil ou la radioactivité d’Areva à Mounana. Pendant que dirigeants et multinationales s’en mettront plein les poches. L’acharnement du gouvernement à faire Bélinga, « envers et contre tout », n’a rien à voir avec l’intérêt national. Il y a longtemps que ces gens-là ont perdu tout sens de l’honneur et du patriotisme. Sinon, le Gabon ne serait pas ce bateau en plein naufrage où une femme et ses deux petits-fils peuvent mourir (le 21/9 à Libreville) écrasés par la masure qui leur servait de maison. Dans l’indifférence totale de la crasse politique au pouvoir, trop occupée à organiser les circuits qui serviront à camoufler le fruit de la prochaine campagne de prédation. Celle du fer de Bélinga. À moins qu’entre-temps, les « dauphins », dans leur empressement à occuper le trône, ne fassent chavirer le navire…
Texte - Justine Okimi Dessin - Waga
PS : article initialement paru en septembre 2007 dans Le Gri-Gri papier