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Le Gri-Gri International           Satirique africain francophone

Né au Gabon en 2001

Pour annoncer Billie Holiday ce soir sur Arte, Nabe, c'est mieux...

Publié le 12 Décembre 2012 par Grégory Protche www.legrigriinternational.com in Arts & culture

Nabe Billie Holiday
Nabe a mauvaise réputation. On le dit méchant, galeux, louche politiquement. C’est très exagéré. Nabe a surtout écrit quelques grands livres. L’âme de Billie Holiday est de ceux-là. Il ressort en poche, à la Table ronde.

Marc-Edouard Nabe a longtemps cherché le moyen de faire croire à ses contemporains qu’il leur était insupportable. Alors que sur les plateaux télé où depuis 20 ans il raconte qu’il est « boycotté », tout le monde l’aime bien. Il vend peu. Mais on l’aime bien. Il gratifie l’auditeur. Mais tellement moins que le lecteur quand il écrit sur Billie Holiday, ou quand il peint Billie Holiday (le portrait en couverture de l'édition poche et ci-dessus est de lui). Nabe pense avoir fait de la subversion politique un art. Alors qu'il n'est subversif politiquement que lorsqu'il parle d'art. Peinture, littérature, cinéma, théâtre, poésie, Nabe est la plus grande et la meilleure des groupies. Grâce à son entertainer à succès de papa (Marcel Zanini), il a eu accès très tôt à « la seule révolution esthétique du XX° siècle », le Jazz. Il en a fait une mythologie sublime, parente proche de celle des boxeurs. Nabe n’aime pas le jazz parce que les Noirs ont sué pour le faire. Mais parce qu’« il n’est pas un chagrin qu’une minute de jazz ne lui eût ôté ». Nabe n’est pas un « spécialiste » du jazz, c’est un fanatique – question rigueur, c’est plus sûr. Nabe n’écrit pas sur le Jazz, il trouve dans l’œuvre de Duke Ellington des solutions à ses problèmes quotidiens. En jazzman pratiquant, il n’utilise les standards du discours que sont la politique, la religion et l’art que pour pouvoir improviser dessus. Si bien que quand il a tort d’un côté, il a raison de l’autre. La moindre des choses quand on a comme lui tété du Monk, l’homme « qui tapait toujours sur la note d’à côté…oui, à côté de la mauvaise ! »

Billie Holiday était pour Nabe : dans le ventre de sa mère, il assista à un de ses derniers concerts. Billie Holiday était pour lui aussi car il est le seul capable d’écrire : « Oui, Billie Holiday se droguait : elle  avait des raisons. Je l’approuve totalement. La drogue n’est plus une misère quand on a un pied dans l’enfer, l’autre au Paradis, à cheval sur l’oubli de « tout sauf ». Car la drogue c’est bien ça : l’évaporation de tout sauf la musique. » Et plus loin : « La drogue explique son complexe d’infériorité, son envie de dormir et l’envie de dormir qu’elle donne, sa lassitude généralisée et l’engourdissement racial, sa timidité, son trac surtout. La drogue a réponse à tout. » 32 chapitres durant, Nabe explore l’âme de cette « nègre d’amour qui chante la bouche pleine, la bouche pleine de lynchés. » Décrivant en fan la moindre des variations d’attitude de Lady Day, recensant et commentant les photos tristes et gaies en même temps, ses rôles au ciné, sa relation unique avec le « Président » Lester Young, ses love stories pathologiques de Romy Schneider noire, son amour de l’amitié, ses mots-notes…

Nabe est enfin en poche. Ainsi ceux à qui vous l’offrirez pourront toujours avoir sur eux « L’âme de Billie Holiday ».

Texte - Grégory Protche

PS : Le troupeau de nabiennes pleureuses a mal supporté que dans ses Questions le Gri-Gri égratignât leur chouchou maudit... Pour nous faire pardonner - et, confessons-le, parce que nous avons très très peur - ce crime odieux, nous re-publions ici, chapeau introductif compris, un article, bien plus favorable, paru en septembre 2007 dans notre version papier, et consacré à la réédition en poche de son Âme de Billie Holiday. (02/03/2010)

PS 2 : à l'occasion de la reprise de cet article, ajoutons-y un extrait de Nabe lui-même parlant de Billie Holiday à la télé française (mis en ligne en juin 2007)

PS 3 : documentaire ce soir sur Arte à 22h20.