Mis en ligne sous le titre Afrique : et maintenant le bal des faux culs !
(19 novembre 2011) Sur le blog de Christian d'Alayer (ICI). Responsable au Gri-Gri de la rubrique Con de Blanc. (ICI).
Fallait bien que ça arrive : qu'un jour, le chantre de la désespérance africaine, j'ai nommé Ben Yahmed, prénom Béchir, oublie toutes les saloperies qu'il a pu déverser (car à son niveau, on ne peut plus parler d'écriture !) sur le Continent dans son journal fort mal nommé "Jeune" Afrique. Je dis fort mal nommé car l'Afrique fut le continent originel du genre humain et que bien des civilisations y ont éclos avant que Béchir ne tente de réfléchir sur sa destinée.
Mais revenons à nos moutons : le dit Béchir vient donc de manger son chapeau avec l'édito qu'il a publié dans le numéro 2758 du 17 novembre de son canard. "Les chiffres ne mentent pas et disent tout aussi vrai que ceux qui en font état pour nous annoncer que s'est levé le vent du changement qui va souffler sur notre continent", écrit de manière ampoulée notre grand homme de presse. Exactement 13 ans moins 21 jours après qu'aient enfin commencé à se retourner les termes de l'échange, retournement qui a permis à l'Afrique de sortir enfin la tête de l'eau avant d'entamer son renouveau dès l'année 2000. Je souligne ce fait car il est statistiquement avéré et je l'avais noté à l'époque avant d'être ridiculisé puis placardisé : j'œuvrais alors à Jeune Afrique et devais m'occuper d'un numéro spécial consacré aux investissements sur le Continent. Et j'avais remarqué une anomalie statistique, soit un auto-investissement anormalement élevé face à la stagnation des investissements étrangers. C'est dire que Béchir ne pouvait pas ignorer qu'il se passait quelque chose. D'autant que j'avais persisté en écrivant et publiant fin 2004 un livre, Un crime médiatique contre l'Afrique - Les Africains sont-ils tous nuls ? dans lequel j'expliquais de manière détaillée, très nombreux renvois à l'appui, pourquoi l'Afrique avait commencé son renouveau. Pas seulement économique d'ailleurs, j'avais insisté sur l'urbanisation du continent que semble découvrir aujourd'hui notre faux cul propriétaire du groupe Jeune Afrique.
Que lui et toute la cohorte d'Occidentaux auxquels il a toujours aspiré de ressembler arrêtent donc de jouer les découvreurs après avoir trompé plus d'une décennie durant leurs lecteurs. Après avoir tant craché sur l'Afrique que les "services Afrique" des entreprises occidentales ont presque tous été supprimés, rattachés pour la plupart à une sous-direction "Afrique et Moyen Orient" privée de tout moyen de développement.
Tous les secteurs y sont passés : Peugeot, longtemps marque phare en Afrique, a perdu pratiquement toute son aura et ses parts de marché ; les vieux comptoirs, CFAO et SCOA notamment, ont quasi disparu avant d'être vendus, le premier aux Japonais, le second aux Marocains ; les banques se sont désengagées, tant françaises qu'anglaises ; et notre glorieux Jeune Afrique voulut même changer de nom pour un substitut, "L'Intelligent", plus con que con avec le recul : car le choix de Béchir fut opéré quand, justement, l'Afrique commençait à se sortir de l'ornière de termes de l'échanges complètement retournés après les premières bonnes années des chocs pétroliers de 1972.
Malheureusement, les faux culs ont toujours raison en public. Souvenez-vous du destin de ce pauvre Primo Lévy, premier à avoir décrit les horreurs des camps de concentration : les Béchir de l'époque, Sartre, Simone de Beauvoir, Jean Daniel etc., etc., ne jugèrent pas opportun de mentionner ses livres dans leurs médias respectifs. Sa première dénonciation des crimes nazis ne fut tirée qu'à 1500 exemplaires. Même musique d'ailleurs dans tout l'Occident et il fallut attendre une quarantaine d'années, oui, une quarantaine, avant que le grand public soit mis réellement au fait de la barbarie nazie. Je n'ai aucun scrupule à comparer ce non dit au non dit sur l'Afrique. Car, en nombre de victimes, je ne suis pas sûr qu'Hitler et ses comparses soient les plus affreux : alors que l'Afrique comptait au moins autant d'habitant que l'Europe au début de la Renaissance, elle n'abritait plus que 120 millions d'habitants au plus en 1900. Razzias (Béchir, connais-tu ce mot ?), traite et colonisation se sont additionnées pour donner ce monstrueux résultat. Tout a été détruit, de fond en comble, au point que même les grandes villes africaines d'aujourd'hui restent les héritières des comptoirs des envahisseurs. Et c'est sur ce terreau, bien entendu nié par nos Béchir et confrères, même aujourd'hui, que ces salauds, je pèse mes mots, ont plus que contribué au manque d'investissements étrangers sur le continent. Retardant donc un envol qui aurait dû se faire tout au plus 30 ans après les Indépendances.
Il y a pire, Messieurs Béchir et confrères ont applaudi des deux mains - s'ils avaient pu applaudir en plus des pieds, ils l'auraient fait - à la destruction des jeunes États africains par le FMI, la Banque Mondiale et les deux "clubs" de Paris et Londres. L'Afrique leur doit au moins vingt ans de retard dans son évolution et je suis gentil.
Ce crétin de Béchir ne peut d'ailleurs pas s'empêcher de cracher encore sur cette Afrique dont il ne peut nier l'envol : "Les Africains, eux, n'ont pas encore senti souffler sur leur pays le vent du changement. Ils ne vivent pas mieux et ne se jugent pas assez bien gouvernés". Il ne peut dire que l'Afrique s'enfonce mais il ne s'avoue pas vaincu pour autant : l'Afrique s'envole mais pas les Africains. Ah bon ? Faudra qu'il m'explique.
J'ai une petite idée de la chose toutefois et je ne pense pas beaucoup m'avancer en vous disant que Béchir écrit essentiellement pour les intellectuels africains émigrés qui vomissent les régimes qui n'ont pas eu -pardon, qui ont eu l'audace de ne pas reconnaître leur talent. Et qui disent à peu près n'importe quoi pourvu que cela soit en mal sur leur pays d'origine. Il en va ainsi des infrastructures dont le patron de Jeune Afrique ne voit point la réalisation. Je le sais parce que j'ai moult fois entendu le discours, au Cameroun par exemple, on reproche à Biya de n'avoir point réhabilité le chemin de fer ni la route entre Yaoundé et Douala. En oubliant que son régime a privilégié deux grandes politiques : la desserte des villes secondaires dans un pays multiethnique qui a prioritairement besoin de calme politique ; et les liaisons avec les pays voisins dans un pays qui a, de tous temps, commercé avec eux. Ces infrastructures là existent bel et bien mais fallait-il encore, pour les voir, s'intéresser réellement au développement du Cameroun ! Je m'étonne aussi du silence jeune-africain sur la route, quasiment achevée, qui relie aujourd'hui l'Algérie au Nigéria. Evidemment, ce ne sont plus les Français qui construisent... Sans compter, tout de même, la reprise progressive en main des ports, longtemps centres de toutes les magouilles liées à la politique... Etc. : Môssieur Ben Yahmed et ne vous en déplaise, l'Afrique a bougé bien avant votre méprisable édito du numéro 2758 du 17 novembre 2013 de votre hebdo. Mais à force de déblatérer sur votre continent originel, je crois que vous en êtes venu à le détester. Au point de ne pas supporter qu'il ne s'écroule pas sous les coups répétés de vos attaques. Au point de ne pas supporter de ne pouvoir dire, dans un "Ce que je crois", "Je vous l'avais bien dit" Et bien non ! Vous avez dit le contraire, vous vous êtes acharné à dire le contraire pendant des décennies. Alors, s'il vous plait, ayez la décence de vous taire aujourd'hui. Vous avez des fils et des journalistes de talent qui peuvent, eux, tenir un discours que votre passé rend malheureusement indigne sous votre plume...
Photo - dr Texte - Christian d'Alayer