Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) Louis Moreno-Ocampo est-il un surdoué ? En tout cas, sans le concours de l’ONUCI, sans que la majorité des victimes s’étant constituées auprès de la CPI n’aient vu le moindre magistrat ou auxiliaire de justice officiel, il a réussi à boucler une enquête par nature extrêmement complexe – puisqu’il s’agit d’établir des faits et d’avoir des preuves sur les chaînes de responsabilités – en moins de… deux mois, et entre deux rendez-vous avec Alassane Ouattara – le premier à Abidjan, le second dans l’appartement parisien de l’ancien directeur général adjoint du FMI.
Ce sont ces étrangetés qui ont fait tiquer Christian Chartier, directeur du centre d'observation de la justice internationale et transitoire de l'université de Limoges, et ancien porte-parole du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), donc bon connaisseur de ce type d’environnement. Lors d’une interview accordée à la radio France Inter, il a tancé Ocampo : « Il aurait voulu faire en sorte que l’on comprenne que la justice internationale peut être instrumentalisée à des fins politiques qu’il n’aurait pas pu mieux faire.» Rappelant que le procureur de la CPI a commencé son travail sur le dossier ivoirien seulement le 3 octobre, il a affirmé que « cette enquête est d’une rapidité suspecte », et que le mandat d’arrêt qui en est sorti « est quand même d’un vague extrêmement inquiétant ». Si les chefs d’accusation sont faciles à formuler, « encore faudrait-il les étayer », avertit-il. « Dans le mandat d’arrêt, on parle de violences contre des communautés ethniques et religieuses spécifiques sans pour autant les désigner. Il y a quand même des choses troublantes dans cette affaire et que je trouve extrêmement inquiétantes pour la CPI », a-t-il poursuivi. Laquelle CPI « existe depuis dix ans et n’a pas rendu à ce jour un seul jugement ne serait-ce qu’en première instance ». Rappelons-le : ce n’est pas là « un extrémiste proche de Gbagbo » qui parle, mais bel et bien un universitaire français renommé, ancien porte-parole du TPIY !
Photo - dr Texte - T.Kouamouo (Nouveau Courrier, 1/12/2011)
PS 2 : le titre est de la rédaction.