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Le Gri-Gri International

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Littérature - Politique - Philosophie - Histoire - Sports - Économie


Entartage, censure et quenelle sur la planète Yann Barthès Version texte

Publié par G.P. www.legrigriinternational.com sur 5 Décembre 2013, 04:01am

Catégories : #Gri-Gri TV

cap-Musca-13-nov-2013.jpg


Dans le Petit journal du lundi 11 novembre 2013. Un dénommé "Hicham", depuis le public derrière l'invité, réalise, pendant l'enregistrement de l'émission et sans que personne ne s'en rende compte, une série de quenelles destinées à ravir les fans de Dieudonné, inventeur du geste - un bras d'honneur sexualisé, analysé, si on veut. La quenelle, si j'ai bien compris, c'est : dans ton cul. C'est du moins le sens que lui donnaient des participants à Secret story, en access prime time sur TF1, il y a trois ans. Preuve s'il en fallait que tel le rap, en d'autres proportions, Dieudonné, son humour, ses gimmicks et running gags ont déjà gâté en profondeur plusieurs générations.

Hicham ou un de ses amis met en circulation l'image forte. Émoi intense sur la Toile qui se tend.
 
Dans l'édition du mardi 12/11. Les excuses (7 mn d'émission, quand même !) de Yann "Big Head" Barthès suite "au troll quenelliste" de la veille. (Pour déplorer une faute journalistique ou rétablir des faits, ils font moins vite et moins efficace). Un sujet suit, constitué des articles et émissions ayant immédiatement dédouané Barthès en sur-interprétant le supposé caractère nazi de la quenelle. Caractère nazi surtout présent, en l'occurrence, dans "leurs cerveaux malades". Barbier le Servile, mécaniquement, met bas une phrase rendue mongolienne par l'introduction d'éléments de langage : "derrière ce geste se cache un salut nazi à l'envers. Ça a été complètement retourné, Dieudonné en tête, pour faire de l'antisémitisme." On aimerait beaucoup qu'il nous explique ce qu'il a voulu dire exactement, parce que, en l'état, la sentence énonce le contraire de ce qu'elle annonce dénoncer.

Et puis c'est quoi : faire de l'antisémitisme ? Ce n'est pas une discipline sportive ou un jeu de société. Surtout en France. Surtout en ce moment. Comme on disait en 2002. À moins que ce ne soit en 1995. Ou en 2007. Comme on me dit depuis que je suis petit.

Autre perle durant l'indispensable et quotidien sujet sur Marine Le Pen : à l'affirmation de la fille de selon laquelle la France ne serait pas raciste, il est objecté le manque de preuves, de chiffres, de statistiques "au niveau mondial"... Jamel Debbouze servant la même soupe ne sera pas questionné. Dois-je en conclure que quand on est blanc, on n'a pas le droit de trouver les Français pas racistes ? C'est emmerdant.

Enfin arrive à l'écran Maxime Musca le malicieux bouclé. Un peu le Rémy, le sans famille de l'émission, celui qui se balade dans la vie avec une caméra qui le suit, qui sélectionne et trie. Maxime marche de Lyon à Paris. En souvenir de la Marche pour l'égalité, improprement dite Marche des Beurs, en 1983. Mais pas du tout en lien avec la sortie bientôt sur les écrans d'un film sobrement intitulé La Marche - ce qui sonne un peu comme La Rafle. En moins tragique.

On retrouve Maxime à Saint-Germain au Mont d'or entouré de têtes blondes ! Des mini Français de souche comme s'il en pleuvait ! Un vrai lebensborn ! Des Guillaume et des Marie partout !
Je sais, je sais, y'a des Kabyles blonds, et les victimes n'ont pas le monopole du combat antiraciste - je connais mon catech', j'ai fait partie des premiers baptisés malgré eux des années 1980.

Franchement, y'avait pas un ersatz de cité difficile, un souvenir de quartier populaire à embobiner dans les environs, avec son lot de têtes grainées à mettre en fond vert ? Même en refusant, comme moi, j'insiste, de voir la proximité entre le sujet et le film à venir avec Jamel Debbouze - qui n'oublie pas, à l'américaine, de mettre une couche de sa morve alcoolisée sur Delon, histoire de se replacer en amont, de réimposer en couverture des journaux son étrange visage interdit d'âge adulte -, ça demeure assez obscène métaphoriquement : la France gaiement bobo de Yann Barthès envoie marcher en souvenir des Beurs de 1983 son playmobil frisé - tout aussi bobo plus fresh, plus sport, plus hétéro, méditerranéen. Entre "Blancos", comme dirait le Sarkozy à la catalane, Manuel Valls.

Barthès lance le magnéto de la journée du marcheur Musca. Elle commence à Vénissieux (big up à Luis Fernandez, produit du cru dont on aurait apprécié le point de vue, lui qui, comme les Minguettes en 1983, commençait à flamber). Les Minguettes. The mythique spot. Rencontre (furtive) avec quelques initiateurs de la marche. Parmi eux Toumi Djaidja. Là sans être là. Là peut-être pour empêcher quelques fêlons carriéristes de venir une ultime fois usurper. Là parce que pour le PS et le gouvernement, non ; mais pour Canal +, du bout des doigts, pourquoi pas. Et à qui, en guise de discours politique Maxime propose un..."câlin" avant de le huguer comme un ado ricain. Toumi Djaidja enfile une perruque qui rappelle sa tignasse d'antan. Blagues avec Max. Rires constipés avec buée sortant des bouches. Les frisés sont tous un peu frères.
 
Dans l'édition du mercredi 13/11. Preuve que les concernés sont touchés : un Gaulois offre une bouteille de rouge à Maxime Musca. Un autre invite les marcheurs à venir déguster un verre de grand cru à boire dans des verres spéciaux. Je sais, je sais, il y a des Maghrébins qui boivent. Khaled ne racontait-il pas à Laurent Boyer que pendant le Ramadan il lui arrivait d'arrêter de boire.
 
Dans l'édition du jeudi 14/11. Minute pendant bien... cinq minutes. La Une, bananière comme une république, avec Christiane Taubira n'a pas encore permis à Elle d'enfin trouver la sienne, mais qu'est-ce qu'elle leur fait du bien aux trop virils Barthès Boys. Toujours aussi peu de contenu, fut-il satirique, rassurez-vous. Mais de l'entrain, une petite tonicité. Leurs Bataille et Fontaine sont encore moins marrants que les vrais depuis qu'on ne les voit plus. On dirait qu'ils pensent avoir trouvé un bon truc avec leur Julie Lescaut en trans.

Place pour quelques minutes à l'autre grand reporter-ter, plus sobre que Maxime, et qui est, lui aussi, en "expédition" : un dans le Groenland, l'autre toujours entre Lyon et Paris. Et ainsi introduit : "Face à la banalisation du racisme en France, fêter la Marche pour l'égalité de 1983 n'a jamais autant été d'actualité." À part peut-être dans les soirées de lancement du film réunissant la production, les médias et les partenaires, et donc sûrement pas Canal +, la vertu, le sens moral et l'élevage de banlieusards au stand up étant, depuis longtemps, les trois mamelles de la chaîne décryptée.

Ce soir, Maxime est à Tournus. On n'atteint même pas le quota minimum de visiblement minoritaires dans la centaine d'enfants bien réglés et disposés près de lui. En revanche, on a déployé une large et chaleureuse banderole souhaitant bienvenue aux Marcheurs pour l'égalité et contre le racisme. La hâte de Barthès à faire parler Maxime de la banderole. On dirait qu'il répond à une ou deux remarques sur l'anti-benetonisme des images proposées chaque soir. On regarde ce qu'il a fait aujourd'hui, Maxime. Ah même parmi les marcheurs, y'en a pas trop des visiblement minoritaires ? Sont-ils ingrats ces Arabes ! On marche pour eux, et non seulement ils accueillent pas le soir avec du thé et des gâteaux de Ramadan ! Mais en plus ils ne se lèvent même pas le matin avec les autres pour démarrer !

Ouf ! Maxime retrouve Arbi Rezgui, marcheur d'à l'époque. "Tu vas pouvoir nous raconter des petites anecdotes", tartuffe Musca. De toute façon, si même Rezgui avait dit quelque chose d'important, comptez sur eux pour le rater. Pas le censurer, pas besoin : le rater. Ils peuvent obéir. Ni réfléchir ni ressentir. Le second degré les a figés comme des mimiques de figurines. Entre Truman show et Orange mécanique.

Il est cool, Rezgui, il leur mâche le boulot. Il tient - justement - à rendre hommage aux Français qui les ont accueillis, suivis en 1983. Rezgui n'a pas pu dire que "ça" d'important. À moins qu'il n'ait vite compris. Quand il raconte à Maxime qu'en 1983, des militants et sympathisants kiné sont venus parfois masser les marcheurs en fin de journée, l'autre enchaîne : "Y'avait des masseuses ?! Attends faut que je twitte un truc là-dessus..." Un prof de gym offre un tee shirt à slogan (que je reproduirai pas). Maxime marchande une séance d'étirement. Deal conclu. Au Téléthon, le message c'est : faisons un effort pour ceux qui ne peuvent pas, récoltons des sous, des dons, auprès de ceux qui regardent et remettons-les aux scientifiques qui travaillent. Mais là, les gens qui stretchent avec Maxime, c'est pourquoi ? Faire baisser le racisme ? Si ça marche, prévenez-moi, je dépose le brevet. Je dois pouvoir moi aussi faire tourner ce genre de crèmerie.

Ultime épreuve de la journée : le rappeur. Son rap en é et en ismes, disons-le tout de suite, c'est rien. Même pas grave. Maxime et un de ses sbires font boum-boum tchak avec leur bouche pour l'accompagner. Ça, c'est grave : Mano, dans son roman Rip Hop, situait la mode du boum-boum tchak en 1987. Le fond fait la forme. À message vieux, rap de vieux. Dit par un jeune timide.
Mais pourquoi avoir tenu à incruster son texte sur les images, on le comprenait très bien ?

Et qui voilà ? L'ex Miss météo de Canal +, la bien nommée Charlotte Lebon. Vedette du film la Marche. Quel hasard Balthazar, comme disait Robert Bresson. Elle s'enduit les mains d'huile et les frotte bruyamment devant le micro afin que Maxime en duplex entende ce son sensuel évoquant le massage..."ça mon pote, c'est le bruit de la victoire !", vagit vulgairement Lebon.
La victoire de qui, Charlotte ? Elle n'est pas en promo, répète Barthès. Avant de nous fourguer le cent-vingtième sujet sur JR, le photogrape audacieux. Elle voulait faire une action pour les 30 ans de la marche et "l'idée" qu'elle a eue, c'est de tapisser façon JR les rues de Lyon de 2500 visages auto-pris en photo. Cultivée, la go. Des visages de "Français", d'humains, se reprend-elle, comme si ce n'était pas fatalement synonyme.
 
Dans l'édition du vendredi 15/11. Maxime reçoit un coup de fil de Jamel Debbouze. Qui l'assure de son soutien et lui affirme être en train de "marcher avec lui". L'occasion de discuter avec Aziz, néo marcheur qui s'est joint depuis la veille au valeureux cortège qui va sauver le racisme, pardon, l'antiracisme. "La France n'est pas raciste", martèle Jamel, qui trouve que : "Frérot, c'est une des plus belles choses que j'aie vues, ton action." C'est vrai qu'il a eu une vie difficile, un rien le réchauffe. Musqua Maxime finira même par trouver un "Yann" local pour héberger Aziz.

PS : le jour du départ de la marche canal+ 2013, à Lyon, place Bellecour, un petit groupe de jeunes gens a entarté Maxime Musqua. Les images sont sur Youtube. Mieux, sur le site du Petit journal, les faits ne sont pas cachés (Schneiderman en a même causé) : "Maxime Musqua a accepté le défi de Yann Barthès pour Le Petit Journal, il doit reproduire (sic) La marche des Beurs qui fête ses 30 ans cette année. Lors de sa première étape, le chroniqueur a été pris à partie par une bande de jeunes et a été entarté sur la place Bellecour à Lyon. (...) Maxime Musqua est revenu sur cet incident dans le journal Le Progrès et a déclaré “Pour l’entartage, en fait, nous sommes arrivés place Bellecour et, juste avant de repartir, des gars m’ont entarté avant de s’enfuir. C’est arrivé très vite, je me suis essuyé le visage, ça m’a permis de me nourrir un peu… Mais bon, je n’ai aucune idée de qui ça vient et c’est sans importance.” Canal+ assure que "Maxime Musqua a pris çet entartage avec beaucoup d’humour et va continuer son périple comme si rien ne s’était passé." Et demande aux internautes : Comment trouvez-vous la réaction de Maxime Musqua après son entartage ?"

PS 2 : Pourquoi Yann Barthès n'a-t-il pas évoqué cet entartage à l'antenne ?

PS 3 : Pourquoi n'avoir pas cherché à retrouver un des entarteurs pour lui demander ce que son geste signifiait ?

Photos - dr   Texte - G.P.

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