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Le Gri-Gri International

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7 jours loin du monde - épisode 3 - Jérôme Reijasse (Catherine Ringer, PSG et Maniac)

Publié par Jérôme Reijasse www.legrigriinternational.com sur 20 Mai 2011, 23:46pm

Catégories : #Jérôme Reijasse 7 jours loin du monde

Reijasse 7 jours loin du monde 3

Jérôme Reijasse n'a peut-être même pas 40 ans. Supporter du PSG, donc homme déçu. Écrivain (Parc). Journaliste chez Rock'n Folk. Traducteur pour les rockeurs à la télé. Lyrique. Exalté. Capable de trouver des raisons de vivre valables dans un groupe ou un artiste encore incontrôlé. Proposera chaque lundi désormais ses 7 Jours loin du monde aux lecteurs du Gri-Gri.

Lundi: rien.
Mardi: rien. Ou une chose alors. Histoire de dire que je respire encore. Rencontre de Catherine Ringer. Je dois lui parler pour la télévision de son nouvel album. Ring N' Roll. Catherine Ringer est en face de moi, pas totalement agressive, certainement pas naïve, aux aguets. Moi, je ne suis pas fier. Son disque, c'est le premier enregistré sans Fred Chichin, guitariste des Rita Mitsouko, mort d'un cancer en 2007. Son compagnon de scène, son mec, le père de ses enfants. Et je vais devoir l'interroger là-dessus. J'ai beau savoir que les artistes sont capables de tout, qu'ils sont parfois d'imposantes machines à vivre, j'ai presque honte, les mains moites, l'envie d'ailleurs hurlant à l'intérieur. Pendant qu'elle parle, tantôt narquoise, tantôt habitée, parfois moqueuse ou hésitante, discrètement mais profondément triste, je le sens, mes pensées se heurtent à mon mur de culpabilité. Jéricho sans trompettes et sans espoir. Un dialogue interne s'engage, comme dans ces dessins animés où la conscience est matérialisée par deux répliques minuscules du héros en plein doute. L'un: “Et si on venait te parler de la perte de l'être aimé à toi ? Et si on te demandait si tes chansons sont nées de cette souffrance si intime, comment réagirais-tu, pauvre connard ?” L'autre: “Hé, attends un peu ! C'est pas moi qui ait voulu composer et vendre un disque là-dessus ! Faudrait pas pousser ! Tu les connais, ces artistes ! Toujours prêts à vendre leur âme, et pas qu'au Diable ! Des pros du divan qui rapporte ! Les Histoires d'Amour finissent Mal, en généraaaaaaaal, tu t'souviens pas ?” Je pose ma dernière question. Sans parvenir complètement à reprendre mon souffle, à me détacher. Je quitte le plateau, plongeur en apnée sans record ni dauphins rieurs. Derrière les piques, les blagues paranoïaques, les disgressions, Catherine Ringer cachait ses larmes. Petit mercenaire sans gloire, je regagne ma cachette du onzième la tête basse. Le loyer sera payé. L'humanité, elle, a contracté une énième dette. Je devrais avoir honte d'être aussi faible devant la mort.
Mercredi: Lille reste premier du championnat, à quatre points devant Marseille. En pleine schizophrénie depuis mon départ forcé du Parc des Princes, je rêve de Ligue des Champions pour mon Club (le PSG, malgré les incompétences arbitrales de plus en plus criardes et un manque de réalisme vertigineux, est en embuscade à une toute petite unité de Lyon, fébrilement installé à la troisième et dernière place qualificative) et je prie également pour une défaite en finale de Coupe de France samedi et une fin de saison catastrophique, sans trophée ni Europe ni rien, juste pour voir les tronches effondrées de nos bien-aimés dirigeants. Zone grise où tout est possible et où rien ne pourra m'apaiser. Je me fais l'effet d'être un traître, un apôtre médiocre. Sensation désagréable.
Jeudi: rien.
Vendredi: j'offre à un dealer de shit mon livre sur le PSG. Il sourit avant de me remercier. J'aime cet instant. Je crois qu'il le lira.
Samedi : Stade de France. De quelle France ? La Black-Blanc-Beur qui vient d'imploser en direct en plein débat sur les quotas ? Quelle enceinte détestable ! Quelle soirée mémorable. Paris perd. Lille gagne sur un tout petit but. Mais l'horreur était ailleurs. Des milliers de supporters, parisiens et nordistes, à la mi-temps, qui chantent l'hymne du PMU, “Il s'appelait Stewball, c'était un cheval blanc...” à la demande du speaker du stade. Ma peur est encore vivace plusieurs heures après l'incident. Un cauchemar. Une vision du futur proche. Une certitude de fin du monde. De mon monde. Inéluctable.
Dimanche: je regarde Vigilante de William Lustig. J'ai acheté le dvd un matin-gouffre. Pas vu depuis des lustres. Un père lambda accepte de plonger dans la vengeance après le viol de sa femme et l'assassinat de son fils. J'aime le genre, entre bas du front et retour aux racines de l'Homme. Mais ça a vieilli. La violence n'en est plus vraiment une. Sans la musique, rock synthétique glaçant, des acteurs qui dévorent la lumière et les images, impeccables, j'aurais même pu ronfler assez rapidement. Interdit aux moins de 16 ans à sa sortie, il ne choquerait même plus un enfant du primaire. Sommes-nous devenus les monstres des temps nouveaux ? Plutôt revoir Maniac donc, le chef d'oeuvre de Lustig... Sale et oppressant comme il faut.

Photo & Texte - Jérôme Reijasse

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