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Le Gri-Gri International

Né au Gabon en 2001

Princess Erika aime vraiment beaucoup la "Colonie du Nouveau monde" de Maryse Condé

Publié le 26 Août 2009 par Gri-Gri International in Le feuilleton littéraire de Princess Erika


Maryse Condé sait raconter l’histoire caribéenne. Depuis longtemps. Qu’importe la façon dont elle l’aborde, elle sait choisir le lieu où le drame se déroule et dépeindre parfaitement les personnages malheureux qui le jouent. La colonie du nouveau monde, menée par son prophète Aton, est échouée à Santa Marta, sur la côte caribéenne de la Colombie et attend depuis plusieurs années le bateau qui les emmènera vers la terre promise… L’Egypte… Aton, fils du Soleil. Un fou, Le Loco comme on l’appelle en ville. L’illuminé ou l’élu ? Lui-même ne sait plus, le Soleil a arrêté de s’entretenir avec lui. Ses disciples, pour le suivre et entendre les saintes paroles à la gloire du Globe Solaire, ont abandonné leur vie passée. 
Tiyi, sa femme, fille de la bonne famille guadeloupéenne Lameynard, anciennement Tanya, n’y croit plus. « Elle est Tiyi, mère des deux princesses Néfertiti et Méritaton, enceinte d’un nouvel enfant du Soleil Aton. » Ils se sont trouvés sur le banc d’une consultation psychiatrique de l’hôpital Saint Louis, à Paris. Ils souffraient tous les deux de troubles schizophréniques selon le docteur Timon. 
Mandjet et Mesketet, les derniers fidèles dévoués, commencent aussi à douter ; surtout quand Aton initie ces deux Allemands fraîchement débarqués, Rudolph et Ute, rebaptisés Hapou et Satamon. Alors qu’eux fouillent sans relâche le ventre en sang de cette terre généreuse pour nourrir la colonie. Sans avoir le droit d’en faire commerce. 
Mandjet, c’était Francesca. Abusée depuis l’âge de sept ans jusqu’à dix-huit par son beau-père, Esnard Boisfer. Aton a changé sa vie et « comme la plupart des gens qui vénéraient Aton elle n’appréciait pas Tiyi. » Mais il n’est plus le même depuis qu’en sortant de la geôle, il a trouvé sa femme « dans le lit du béké. » 
Mesketet est José Meriot de Port-Louis ; même si il a du mal à s’en souvenir. Arrimé depuis si longtemps à Mandjet…  
Quatre Haïtiens à la recherche de leur président et d’un Dieu vivant, viennent s’ajouter à ce nouveau monde qui n’a plus trop de liens avec la réalité et l’extérieur. Mis à part Enrique Sabogal, « le seul et unique conseiller municipal  communiste de Santa Marta » et responsable de leur venue à la Ceja, un quartier de la ville. S’il n’était pas fou amoureux de Tiyi et prêt à tout pour elle, la colonie serait expulsée depuis longtemps. 
« Le Soleil est un geôlier qui ne connaît pas le pardon. » 
Rudolf ne peut réprimer ses pulsions brûlantes et coupables pour Néfertiti. Tiyi tombe gravement malade et manque de mourir plusieurs fois. Elle erre entre rechutes et démence. Loin d’Aton et sous la protection d’Enrique. Ute croit, dans les bras de Mesketet, oublier que  Rudolf se détourne irrémédiablement d’elle. Mesketet, fort de cet amour et de l’argent volé à Rudolf, s’aventure jusqu’en ville. Des espoirs renaissent pour s’éteindre aussitôt. Les Haïtiens s’entredéchirent et s’enfuient. On retrouve le corps de Néfertiti « là où le sel de la terre se mélange à l’eau douce du rio. » Aton s’immole par le feu détruisant en même temps que son enveloppe charnelle tout espoir de rédemption. 
Personne n’est épargné. Même l’argent n’achète pas la misère. Les illusions prennent le goût d’une racine amère. Même l’innocence explose en plein vol quand Aton est en colère. Maryse Condé, comme une conteuse lors d’une veillée, éclaire d’un trait lumineux le destin funeste d’une colonie perdue. 


Texte – Princess Erika