Les peuples autochtones du Canada se soulèvent contre le colonialisme et Areva
Publié le 12 décembre 2016 | 1 commentaire
De la confédération iroquoise aux conseils de territoires de chasse innus en passant par les districts Mi’kMaqs, des formes de la « souveraineté autochtone » ont su se maintenir malgré les assauts répétés de la violence coloniale. Cette Résistance contre la politique des États coloniaux révèle le vol légalisé des terres par les compagnies minières dont Areva.
Résistance à la colonisation et au vol des terres
Des « souverainetés ancestrales » (peuple original autochtone) s’organisent au Canada alors que ce lèvent aux USA une lutte historique sur le territoire de « Standing Rock » contre la construction du « Dakota Access Pipeline » visant à exploiter et écouler par oléoduc, sur une distance de près de 2000km, l’énergie extraite du sous-sol des territoires. Les soutiens à la lutte de Standing Rock s’amplifient et cette résistance active devient le symbole du Pouvoir Autochtone en écho à toutes les résistances actuelles des autres territoires.
Ailleurs, comme sur l’île de la Tortue (premier territoire colonisé de Saint Domingue par la France) les peuples autochtones résistent aussi contre les projets de l’industrie extractiviste. C’est que de la « confédération iroquoise » aux « conseils de territoires de chasse innus » en passant par les « districts Mi’kMaqs », des formes de la souveraineté autochtone ont su se maintenir malgré les assauts répétés de la violence coloniale.
Dans son désir dominateur de voir les ressources extraites du sol, le colonialisme aura mobilisé tous ses efforts pour détruire ces souverainetés et peuples. Il s’agit d’une véritable guerre mettant en oeuvre un ordre colonial contre les résistances autochtones.
A l’image des CETA et Tafta élaborés au niveau international, les traités qualifiés de modernes par les colonisateurs sont la poursuite sous de nouvelles formes de la terrible Loi sur les Indiens qui a enfermé dans des réserves les peuples autochtones, les a dotés de conseils de bandes soumis aux autorités coloniales et les a lentement séparés de leurs territoires.
Exploitation et exploration des gisements d’uranium par Areva
Dans cette guerre, l’ordre colonial reprend ses vieux habits et s’arme de nouveaux traités dans son désir de faire abdiquer les ancestrales souverainetés. Le « traité Petapan » négocié actuellement avec les conseils de bande innus de Mashteuiatsh, Essipit et Nutashkuan en est un exemple frappant. L’État québécois y propose « d’harmoniser » les droits ancestraux autochtones avec les siens, mettant fin ainsi à l’aide fédérale prévue par la Loi sur les Indiens et ouvrant de fait le territoire innu à l’exploitation de ses ressources. Dont l’uranium du nord canadien exploité par Areva.
Depuis 1964, « Areva Resources Canada Inc. » (ARC) exploite principalement le minerai d’uranium de McClean Lake, les mines de McArthur et de Cigar Lake (en association avec le japonais… Tepco) et l’usine de Key Lake dans le Nord de la province de Saskatchewan habité originellement par plusieurs communautés amérindiennes. Situé à 450 mètres sous la surface, dans des roches peu stables et gorgées d’eau, Areva met en œuvre à 450/600m sous terre une méthode d’exploitation par abattage hydraulique (Jet Boring system), méthode proche de celle utilisée pour les gaz de schistes par fracturation hydraulique.
Et l’appétit boulimique d’Areva ne s’arrête pas là. La société nucléaire en décrépitude mène des campagnes d’exploration de nouveaux gisements uranifères dans le bassin d’Athabasca et dans les provinces d’Alberta et du Nunavut. Le pillage organisé des terres autochtones.
Le scandale franco-canadien « UraMin » d’Areva
Le scandale « UraMin », cette véritable affaire d’État politico-financière française impliquant Areva, est loin d’être terminée. Le 23 décembre 2004 Areva crée de toute pièce une société « Uramin Holding » enregistrée à Nanterre dans la tour Areva. Deux mois plus tard, le 25 février 2005, une autre société « Uramin Inc. » est immatriculée dans les Iles Vierges Britanniques, le paradis fiscal de l’archipel des Antilles britanniques. Introduit à la bourse de Toronto – connue pour être beaucoup plus laxiste que celle de Londres- en décembre 2006, le titre Uramin fait l’objet pendant tout le printemps d’une spéculation enfiévrée, dans des volumes de plus en plus importants.
Courant 2006 un consultant spécialiste des questions énergétiques, Olivier Fric, fait embaucher chez Areva un ami financier belge en tant que responsable du développement et des acquisitions de sa division mines chargé de servir d’intermédiaire dans le rachat de la société canadienne UraMin. Olivier Fric est le mari de la Pdg d’Areva Anne Lauvergeon. Areva rachète au prix fort les concessions minières d’UraMin alors que les gisements d’uranium se révèlent inexploitables.
Les pertes financières sont considérables : plus de 3 milliards d’euros. Anne Lauvergeon est limogée puis mise en examen par la justice. Des entrepreneurs canadiens et plusieurs responsables politiques français et africains sont concernés par le scandale encours.Au pays de l’atomisme et du nucléaire ont évolue dans une autre dimension. Privatisation des profits et socialisation des pertes. C’est l’Etat et donc les contribuables qui renflouent en permanence. Et les dernières découvertes de falsification dans la fabrication des pièces des réacteurs et de non-conformités viennent illustrer les mensonges et le fanatisme d’un secteur d’activité des plus éloigné de la science, de la haute technicité, de la compétence commerciale et financière, de la sécurité et du respect humain et environnemental.
Les quatre centrales nucléaires canadiennes menacent l’environnement et la population
Dans son rapport automnal publié mardi, la commissaire fédérale canadienne à l’environnement juge sévèrement l’organisme public chargé de vérifier les quatre centrales nucléaires canadiennes1. La CCSN (Commission canadienne de sûreté nucléaire, l’équivalent de l’ASN française) a baissé ainsi de 11% ses inspections entre 2013 et 2015. En cause : le remplacement d’inspecteurs expérimentés par de « vertes recrues », une stratégie de moindre implication, une planification des contrôles défaillante et le non-respect de ses propres procédures d’inspections. «Cela s’est traduit par des incohérences, des lacunes dans la documentation et des occasions manquées de recenser des améliorations dans le processus d’inspections», a-t-elle noté. Compte tenu du niveau de risque, la commissaire juge que ces comportements ouvrent la porte à « des risques pour l’environnement et la population ».
Pendant ce temps-là, une femme innue, Jeannette Pilo, qui fut et est de beaucoup de luttes de son peuple contre le colonialisme et le nucléaire, a été incarcérée pour s’être opposée au retour à son poste d’un « chef de conseil de bande » (communauté autochtone) accusé d’agression sexuelle sur une jeune fille de moins de 14 ans et d’entente avec la compagnie nucléaire Hydro-Québec. En Amérique du nord, la culture du viol est concomitante à l’histoire coloniale dévastatrice d’Hydro-Québec qui se poursuit encore aujourd’hui, tout comme les incarcérations coloniale et politique.
La résistance et la lutte
Les batailles des dernières années se sont gravées dans les mémoires des populations autochtones et locales : Elsipogtog en 2013 où les « warriors Mik’Maqs » (peuple premier de Gaspésie) et leurs Alliées ont brisé les projets du gouvernement du Nouveau-Brunswick et de la compagnie « SWN Energy », le mouvement «Idle No More » contre la violation des traités ancestraux, la lutte du peuple innu contre les projets hydroélectriques du gouvernement québécois et bien d’autres encore.
Ces luttes portent en elles d’autres formes de souveraineté et d’affirmations qui rendent inopérantes celle du « Dominium Canadien »et celle de l’Empire Américain. Ces « souverainetés autochtones » sapent la légitimé des États coloniaux en révélant le vol des terres sur lesquelles ces puissances étatiques reposent. Elles sont inséparables d’un mouvement de re-construction d’anciennes et de nouvelles formes politiques. C’est à un véritable mouvement de décolonisation que portent les peuples et les communautés qui prennent racine dans un « être au monde » datant de bien avant l’arrivée de Jacques Cartier.
Ceux et celles qui désirent penser la décolonisation se doivent de comprendre et mieux cerner les formes contemporaines du colonialisme. Tout autant, il se doivent aussi de réfléchir la décolonisation dans ses multiples formes politiques et dans son rapport à une tradition ancestrale qui s’oppose à la logique des gouvernement occidentaux.
C’est pourquoi, faisant suite à plusieurs conférences (novembre 2015, février 2016) plusieurs collectifs ont décidé de joindre leurs efforts pour organiser ses journées anticoloniales (25-27 novembre 2016) pour approfondir les enjeux actuels des luttes autochtones sous l’angle du rapport entre la souveraineté et le territoire. Objectif : fédérer les efforts des collectifs anticoloniaux, des alliées, des résistant-es autochtones et des communautés en lutte2. Pour sortir du sordide, de l’aberration, de l’esclavage et faire vivre un autre monde libéré de l’oppression, de l’extractivisme, du pillage et du nucléaire.
1 L’Ontario compte trois centrales nucléaires, l’autre centrale atomique se trouvant au Nouveau-Brunswick.
2 https://www.facebook.com/events/1714559175537896/?active_tab=abouthttps://www.facebook.com/events/1811673662455585/?notif_t=plan_user_invited¬if_id=1478554356457597
http://www.littor.al/2016/03/lautre-souverainete-premiere-partie-les-innus/
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