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L’après Occident
Salut tout le monde ! Me revoilà sur la demande presque expresse de votre directator qui m’a encensé sans que j’aie rien demandé. Comme je ne suis pas né de la dernière pluie… Et puis en fait, j’avais très envie de vous parler non de vous mais de nous, les Blancs à l’odeur de cadavre frais, puisqu’il paraît que vous voulez nous « remplacer » par vagues d’immigration successives. C’est du moins la chanson qu’on entend de plus en plus chez nous en voyant nos frontières assaillies par des basanés de toutes provenances voulant se faire passer pour des réfugiés syriens.
Bien. Vous savez que la cohésion de l’empire occidental n’est pas totale ni solide et vous savez qu’il va s’écrouler et comment il va s’écrouler, de manière économique exclusivement. Pour imaginer la suite, il faut vous mettre dans votre propre peau d’ex paumé du Tiers Monde accédant aux bienfaits de la consommation. Car l’Occidental déchu ne pourra plus que regarder évoluer un monde qu’il ne dirigera plus, qu’il ne dirige déjà plus. Vous êtes donc et d’abord un Chinois de Pékin, un « Han », du nom de l’ethnie majoritaire (là bas, ils parlent carrément de nationalités) du pays, l’équivalent des Anglo-Saxons en Occident. Quelles sont vos préoccupations politiques ? Est-ce absolument, comme le voudraient les Occidentaux, l’avènement de la démocratie ? Sachez que les Chinois n’ont jamais vécu ce système d’un homme-une voix : chez eux, c’est la famille qui compte. C’est au sein des familles que les destins sont noués, celui qui sera fonctionnaire, celui qui fera des grandes études, celle qui sera mariée à untel, etc. L’avènement des grandes cités n’a pas fondamentalement changé ce système dont l’essence est religieuse : le culte des ancêtres reste très prégnant et ne se pratique qu’au sein du groupe familial. Certains d’entre vous, notamment les Forestiers, connaissent cette culture et la force qu’elle peut avoir auprès des individus.
Vous n’allez donc pas développer votre vision du monde hors cette cellule familiale, c’est totalement inconcevable. Et, dans l’immédiat, les dites cellules familiales semblent avoir parfaitement intégré le capitalisme, nettement mieux d’ailleurs que le socialisme. Car ce capitalisme se pratique avec le filet de sécurité de la famille, bien plus rassurant que n’importe quelle politique de sécurité sociale : la Chine n’est pas l’Occident mais elle a parfaitement intégré le tout fric de l’Occident, CQFD ! Comment réagit-elle donc face à l’effondrement occidental. En père de famille, bien sûr, d’abord inquiète pour ses avoirs, considérables, qu’elle possède chez ses clients. Et, de fait, la Chine n’assiste pas sans bouger aux problèmes occidentaux. Elle est par exemple venu au secours du Portugal, c’est une entreprise chinoise qui a sauvé Peugeot-Citroën et elle continue à conserver par devers elle d’énormes créances sur l’Occident (on parle de 800 milliards de dollars) En fait, les Chinois redoutent plus que vous l’effondrement d’un Occident qui reste son premier client à l’export.
Mais ils ont le sens du long terme, toujours cette approche familiale des problèmes. Et ils ont entrepris depuis plus de 5 ans maintenant de sortir de l’économie dite de l’offre (encourager la production exportatrice plutôt que la demande intérieure) et d’alimenter leurs entreprises grâce à l’énorme potentiel de leur immense marché intérieur. Ils ont progressivement augmenté les salaires, si bien qu’ils ne sont même plus compétitifs sur ce plan par rapport à des pays comme le Bengladesh, les Philippines et bientôt l’Afrique. Et bien sûr, dans ce système intermédiaire, dans lequel le poids du marché intérieur est encore insuffisant par rapport aux exportations, ressentent-ils plus durement la baisse des achats occidentaux et la concurrence des nouveaux chouchous des multinationales. Leur croissance annuelle faiblit donc, sans doute plus qu’ils ne l’avouent mais sans doute moins que les « experts » occidentaux, très prompts à voir s’effondrer les autres économiques que les leurs, ne le disent entre eux. Natexis, la banque curieusement écoutée par ces experts (curieusement car issue d’une faillite retentissante) estime la croissance chinoise en 2015 à 2,5% contre les 7 % officiellement annoncées. 7 + 2,5 = 9,5 divisés par deux = 4,75 %... Ce qui n’est pas si mal que ça !
Les Chinois vont donc passer les prochaines années à se préoccuper d’abord de leur marché intérieur. Mais ils ont déjà posé les jalons de leur future domination économique mondiale : le yuan est devenu monnaie de réserve internationale acceptée par le FMI et les échanges avec la Russie sont désormais libellés en roubles et en yuans. Pour couronner le tout, les Chinois ont constitué et continuent de constituer d’énormes réserves d’or sur lesquelles ils pourront appuyer la valeur de leur monnaie quand le dollar et l’euro seront minés par l’inflation. Bref, ils sont prêts, ils attendent et domineront effectivement non seulement l’industrie mondiale mais aussi les échanges internationaux (c’est déjà le cas, les échanges maritimes dans le Pacifique ayant dépassé ceux d’Atlantique nord) et l’aspect monétaire de ces échanges. Et leur domination ne sera pas brutale et agressive : ils viendront au secours… Très forts car pas du tout impérialistes ! Ce n’est pas l’invasion d’une armée innombrable de petits hommes jaunes mais le rayonnement progressif d’une multitude de familles de grands humains aux yeux bridés (ils sont plutôt grands en moyenne).
Ils ont toutefois – et ils le savent - un talon d’Achille, leur démographie : ils ont écouté les Occidentaux et réduit par la loi le nombre d’enfants qu’ils pouvaient avoir : un et un seul, surtout pour les Hans (92% des Chinois) Si bien que d’une part, les autres « nationalités » ont crû nettement plus vite et que, d’autre part et surtout, leur pyramide des âges ressemble à un pin parasol : un pied (les jeunes) tout maigre supportant une énorme masse de moins jeunes et vieux. Ils vont avoir un trou démographique énorme (imaginez les problèmes de retraite !) et devront nécessairement s’ouvrir largement à l’immigration. Voyez le système familial dans ce contexte d’immigration rapide et massive. C’est à cause de ce problème que la Chine ne dominera pas seule le Monde, j’y reviens très vite, et connaîtra d’énormes convulsions culturelles internes.
Un dernier mot sur les Chinois : face aux dépenses militaires démentielles des Etats Unis, ils ont forcément dû réagir pour constituer une contre menace de niveau suffisant. Les Russes ont fait de même et on a vu, avec le conflit en Syrie, que les Etats Unis, en dépit de leur arsenal dingue, n’avaient plus la suprématie militaire mondiale. Les Chinois, comme d’hab., sont restés en retrait. Mais ils ont commencé à titiller les Américains au large de leurs côtes pour faire savoir qu’eux aussi n’avaient plus peur du « tigre de papier » Ce qui laisse à penser que d’affaires localisées en affaires localisées, la domination militaire américaine finira elle aussi par s’évaporer : dans une vingtaine d’années au plus, ils ne feront plus peur à personne. Ce qui posera le problème, qu’ils n’ont d’ailleurs pas réglé car se focalisant trop sur la déstabilisation des pays producteurs de pétrole, de la dissémination des armes de destruction massive. Gageons que la disparition de l’empire occidental devrait favoriser une vraie conférence mondiale sur la question, apportant des solutions plus durables que la menace d’une intervention américaine ! Et posez-vous une question : que croyez-vous qu’il adviendra, dans un monde qui ne sera plus dominé par l’Occident, des risques de guerre engendrés par la question palestinienne, la question ukrainienne ou la question saoudienne ? Je gage que la vraie communauté internationale, pas celle de l’Occident, impose cette fois-ci des conditions propres à mettre définitivement fin aux tentations de dérapage : les risques existent parce que l’Occident soutient jusqu’à l’absurde un camp contre l’autre. L’entente entre la Russie et la Chine face à un Occident qui ne pourra plus peser autant empêchera cette logique et permettra à la diplomatie de retrouver sa place prépondérante dans les relations internationales. Il fallait que l’empire occidental disparaisse !
Je reviens à présent au talon d’Achille chinois : il n’existe pas dans l’histoire de l’humanité d’empire qui, confronté à d’énormes problèmes culturels internes, ait perduré. La domination chinoise sur l’économie mondiale est d’ailleurs déjà en train d’être concurrencée par l’Inde d’abord, l’Afrique ensuite. Ces géants démographiques –car il faut être démographiquement un géant pour s’imposer au niveau mondial- se sont éveillées à leur tour et successivement. Il faut vivre dans ces contrées pour en sentir la vitalité, tous ces jeunes qui veulent entreprendre, tous les idées qui fusent, toutes les remises en question qui dérangent… Les dirigeants politiques n’en peuvent mais, obligés qu’ils sont de regarder grouiller les initiatives. Peu importe en fait qui dirige et qu’il vole ou non l’argent public. Peu importe qu’il y ait ou non le droit de vote et la démocratie formelle : l’activité économique bouillonne. On voit que des faits plus objectifs peuvent nuire ou non à la croissance, tel le franc CFA en Afrique francophone : il a fait passer les Afriques anglophones et lusophones devant ceux qui, hier encore, pouvaient parler d’Abidjan comme de la Perle de l’Afrique. Ou tel le montant d’argent pouvant être investi dans l’économie : les étrangers répugnent toujours à mettre le moindre sou dans votre continent mais vous avez fait grimper votre taux d’épargne familial à plus de 20% aujourd’hui de votre PIB tandis que les étrangers remplaçaient le leur par le crédit des banques. Les Africains ont constitué en quelques décennies le plus fort taux d’entreprenariat par habitant. Les salariés ne représentent même pas chez vous 20% des actifs !
C’est toute cette vitalité qui fera de l’Afrique le continent définitif de la compétition économique mondiale, bien plus que tous les retours à une Antiquité, très mal connue en plus, que souhaitent bien des intellectuels africains. Leur voix était nécessaire pour redonner confiance à tous les Africains. Mais c’est sa jeunesse qui rendra à l’Afrique sa majesté antique, celle qui vit naître le Lingala tout au long du fleuve Congo, première langue commerciale du monde et, déjà aujourd’hui, principal langage utilisé dans toute l’Afrique centrale avant, très certainement demain, d’être enseigné dans le monde entier auprès de peuples qui voudront commercer en Afrique.
Les Latins, sans doute, voudront se rapprocher de l’Afrique et du monde méditerranéen quand l’Union Européenne aura implosé. Mais votre regard sera alors différent, il est déjà différent : vous serez conquérants. Et c’est peut-être avec vos apports que la culture latine renaîtra, peut-être…
Vous noterez pour conclure que je ne parle pas de domination militaire ni pour l’Inde, ni pour l’Afrique. Pour une raison simple : d’abord et dans ma vision, le problème militaire, l’accumulation d’arsenaux coûteux, devrait être réglé dès que les Occidentaux auront cessé de se coucher devant leurs lobbys militaro-industriels. En fait, ça viendra vite : quand ils n’en n’auront plus les moyens… Ensuite et surtout, l’Afrique n’est pas guerrière. Ce sont les Arabes d’abord, en armant et finançant les Sahéliens pour qu’ils razzient le monde Bantou, puis les Occidentaux, en imposant des frontières idiotes aux Etats indépendants puis en y fomentant des troubles sur fond ethnique, qui ont créé cette illusion. En part de leurs PIB, les Africains sont parmi les peuples qui dépensent guerrièrement le moins. Les Indiens un peu plus car ils ont des voisins remuant, Pakistan et Chine. Mais pas exagérément non plus.
Le monde qui vient sera donc très différent de celui que nous quittons. Les peuples vont se mixer de plus en plus mais je ne crois pas qu’une fois l’Occident tombé, l’actuelle mondialisation culturelle perdurera. Elle est beaucoup trop rejetée, y compris au sein de l’Occident, pour tenir longtemps. Le tout fric, l’hyper consommation, tout cela ne remplit pas les âmes, les pervertit même. Il y aura donc des réactions, il y a déjà des réactions, à commencer par la réaction écologique : totalement absurde aujourd’hui, cette réaction n’en appelle pas moins à une réflexion sur l’environnement que nous souhaitons. L’absurde également réaction wahhabite sera jugulée, elle manque à la fois de moyens et de bras au niveau mondial. Mais elle a remis la question religieuse sur le tapis au moins chez les Musulmans, première ou deuxième religion mondiale devant ou derrière les christianismes. Les gens ne sont peut-être pas d’accord, mais ça les force à penser à l’au-delà. La technologie enfin et surtout, va mettre beaucoup de savoir à la portée de beaucoup de gens. Pour l’instant, Internet est surtout lieu de jeux, de culte de soi-même (l’individualisme anglo-saxon) et de pornographie. Mais on voit hors l’Occident qu’il est aussi lieu d’alerte et d’échanges philosophiques…
Ce sont ces trois éléments, l’environnement, la religion et la technologie qui vont dominer notre futur. Un futur beaucoup plus complexe qu’il n’y parait aujourd’hui : car la mixité croissante des populations fera évoluer les cultures qui seront-elles-mêmes plus riches et évolueront différemment entre ces trois paramètres. Un exemple ici : les jeunes Musulmanes qui veulent afficher leur identité en Occident alors qu’elles veulent s’émanciper en Afrique sahélienne. Ou bien les cuisinières fang qui résistent à la culture française impériale en la matière (sauf en Asie) face à d’autres cuisines africaines qui se francisent en perdant parfois leur africanité (voir par exemple le tiéboudienne dans les restaurants de Dakar : les brisures de riz ont été remplacées par du riz blanc et tous les ingrédients qui donnaient son goût à ce plat ont disparu : huile de palme rouge, nététou, poisson fumé, piment…)
Bref, ce sera très différent et beaucoup plus riche. L’empire occidental imposait un style de vie (plutôt qu’un art de vivre !) mondial, ce style de vie disparaîtra en même temps que l’empire car cet empire n’est pas aimé et son style de vie est rejeté. CQFD…
Je suis désolé pour conclure d’avoir été aussi sérieux. Mais c’est du premier jus et on ne peut pas d’entrée rigoler avec de telles réflexions. Le Con de Blanc n’a pas pu donner toute sa mesure. Mille fois pardon…
A suivre
Texte : Christian d'Alayer (cliquez pour accéder à son indispensable blog)