Les débuts désastreux du nouveau Président béninois, Patrice Talon, notamment à l’international, allant du voyage à Abidjan pour aller prêter serment devant son prédécesseur Yayi Boni à la fausseté et à l’incongruité des propos tenus à Paris devant le Président français, ont soulevé désapprobations et inquiétudes légitimes de la part du peuple béninois. Ces comportements où se mêlent des sentiments d’amateurisme et de vouloir donner des gages à la françafrique, confirment la nécessité de la tenue des Etat généraux du peuple afin de procéder à un état des lieux et d'adopter une feuille de route qui prenne en compte les aspirations du peuple pour une Rupture et un Nouveau Départ véritables. C’est ce qu’indique le PCB dans ce numéro 70 de son journal « LE CREPUSCULE DU MATIN »
Initialement paru sous le titre :
LES « BOURDES » DE TALON ET LA NECESSITE DES ETATS GENERAUX DU PEUPLE
Depuis le 15 avril 2016, les Béninois de l’intérieur comme de l’extérieur, se posent des questions à propos des voyages, actes et propos du nouveau Président Patrice Talon. D’abord, parce que ces voyages ne sont pas officiellement annoncés ; ensuite les propos tenus par leur Président ne sont connus que par le biais des médias étrangers, enfin et surtout ces propos sonnent à faux par rapport au mandat dont ils pensent l’avoir investi. Il en est ainsi du voyage et de la rencontre à Abidjan le 18 avril entre Talon et Boni Yayi sous l’égide des présidents togolais et ivoirien. "Le serment à Boni YAYI d’être un bon président" fait par Talon à Yayi a soulevé désapprobations et inquiétudes légitimes de la part du peuple qui conçoit mal que son président élu contre Boni Yayi puisse aller prêter serment devant celui dont le peuple attend des comptes sur les nombreux crimes politiques et économiques. La rupture est-elle déjà mise entre parenthèses ? En tout cas, jusqu’à ce jour, le peuple ne sait ce qui lui revient de bien et de bon de ces discussions et entente entre Talon et Boni Yayi. De la Côte d’Ivoire, le Chef de l’Etat s’est envolé sur Paris. Les Béninois ont eu à suivre les propos du Président Talon à la conférence de presse après sa rencontre avec le président français, François Hollande le mardi 26 avril. La fausseté et l’incongruité des propos tels que "le Bénin est aujourd’hui comme un désert de compétences" aussi bien dans l’administration mais également (plus loin dans sa déclaration) au niveau des " services de sécurité et de défense, des services de renseignements" ont soulevé un tollé dans la population. Surtout que comme solution à ce désert de compétences, le Président du Bénin demande au Président français de « nous accorder de la compétence tout de suite », de « nous donner des cadres, de l’assistance technique pendant quelques mois, quelques années ». A la négation de l’existence des compétences du Bénin, il ajoute le retour en force et en grand des assistants techniques français pendant que des milliers de talents chôment ou sont mis aux placards. Devra-t-on voir le retour au Bénin d’une base militaire française, force d’occupation chassée en 1964, pour soi-disant suppléer au désert de compétence dans les services de sécurité, de défense et de renseignements ? La ficelle est si grosse que le journal "la Nouvelle Tribune" du 27 avril 2016 a qualifié ces propos de « grosses bourdes de Patrice Talon à l’Elysée ». Le tollé général suscité a obligé Talon à son retour au Bénin, le 27 avril à faire comme un compte rendu de son calendrier pendant les 12 jours d’absence du pays. Il a pu dire : « Je ne me suis engagé dans aucun compromis encore moins aucune compromission préjudiciable à mon engagement de bonne gouvernance, de Rupture et de Nouveau Départ ». D’accord, mais on ne sait toujours rien de ces intrigues de coulisse, et pourquoi à Abidjan ? En ce qui concerne les propos relatifs au "désert de compétences", Talon a tenté de se rattraper, de circonscrire le manque de compétences au niveau de l’administration, dans quelques « domaines limités et pour un temps très limité ». On espère que ces domaines limités et pour un temps très limité concernent également la sécurité, la défense et les services de renseignements. En tout cas, vouloir le retour d’une base militaire étrangère dans notre pays, après le départ en 1964 de la base militaire française, serait une forfaiture inadmissible contre la souveraineté nationale. Mais ce qui provoque l’indignation du peuple, c’est que tout ce périple ainsi que les propos incongrus du président Talon apparaissent comme un reniement de la victoire populaire sur la tentative de recolonisation et de maintien de la continuité. Le journal « Le Matinal » en date du 27 avril 2016 a conclu son analyse des propos de Talon à l’Elysée que « Patrice Talon veut gouverner en s’appuyant sur la France ». Le peuple ne comprend pas qu’après avoir rejeté la recolonisation, on aille solliciter le renforcement de la FrançAfrique avec ses assistants techniques aux commandes. Le peuple ne comprend pas qu’après avoir rejeté la mauvaise gouvernance de Yayi, on puisse aller prêter serment devant lui. Le Parti Communiste du Bénin, la Convention Patriotique des Forces de Gauche, le Front de Refus du Bénin Waxala ainsi que beaucoup de personnalités et de démocrates, bien imprégnés des attentes du peuple ainsi que de la profondeur de la crise, avaient préconisé que la priorité des priorités devrait être la convocation et la tenue des Etat généraux du peuple afin de procéder à un état des lieux, de déterminer les nouvelles règles qui permettent de rompre avec le système d’impunité et du pacte colonial afin de relancer le développement économique et social du pays. Une telle assise donnerait un contenu concret à ce qui est appelé Rupture et permettrait un véritable nouveau départ. On aurait par exemple bien situé le fait que ce qui mine l’administration béninoise est moins un défaut de compétences que l’impunité qui autorise le placement et le soutien clientéliste de cadres incompétents et corrompus. On aurait recherché les voies et moyens de promouvoir la compétence, la probité et le patriotisme au service du pays ; de donner plus de droits aux travailleurs et aux citoyens pour le contrôle des gestionnaires du bien public. On étudierait par exemple comment les expériences comme celle de l’Université où le recteur, les doyens, les chefs de département ainsi que les directeurs des Ecoles sont élus, pourraient s’étendre à toute l’administration publique et parapublique. On éviterait au peuple ces bourdes humiliantes et ces négations de sa souveraineté et de sa dignité de la part de son Président. La colère des citoyens, la houle de désapprobations populaires indiquent que le peuple est debout. Pas plus que la recolonisation, le peuple n’acceptera pas la continuité du système d’impunité et du pacte colonial.
La Rédaction
Le Crépuscule du matin N°70 28 avril 2016
Prix : 50 francs
Organe de liaison du Parti Communiste du Bénin
Directeur de Publication : Philippe NOUDJENOUME
Rédacteur en Chef : Jean Kokou ZOUNON