Bilan de six ans de pouvoir très flatteur, legs à l’Etat gabonais de la totalité de sa part de l’héritage qu’il devra recevoir de son père Omar Bongo Ondimba, dons des propriétés familiales situées en France et au Gabon à l’Etat Gabonais… Le chef de l’Etat du Gabon a marqué les esprits. Malheureusement dans le sens de la démagogie.
Omar Bongo Ondimba a eu son moment de vérité en 2007. Il avait reconnu que « Dieu ne nous a pas donné le droit de faire du Gabon ce que nous sommes en train de faire(…) ».
Ali Bongo Ondimba a voulu dépasser son père en « restituant au peuple gabonais» une partie des biens volés par son père. A la différence qu’Omar Bongo Ondimba, en 2009, était sincère lorsqu’il avait prononcé son discours testament. L’actuel chef de l’Etat est resté fidèle à sa ligne de conduite qui semble coulée dans le mensonge. Car tout ce qu’il a annoncé, le 17 août 2015, au soir n’était que des contrevérités, voire de nouvelles promesses qu’il rangera aussitôt dans son armoire à « maquettes ». Il est cerné de partout, aussi bien à l’intérieur de son propre parti, le PDG, qui ne veut plus de sa gouvernance, qu’à l’extérieur par le reste du peuple gabonais. Acculé par la justice française qui se rapproche de lui au travers de plusieurs procédures, dont la plus récente contre son directeur de cabinet, Maixent Accrombessi, son nkani, Ali Bongo Ondimba a voulu faire diversion pour essayer de faire oublier ses malheurs le temps d’une fête de l’indépendance. Avec un aplomb sans pareil, malgré les évidences, le chef de l’Etat du Gabon s’est attribué un bilan des plus flatteurs, après six années de pouvoir. Ainsi, les Gabonais apprennent que des centaines de milliers d’emplois ont été créés par l’économie du Gabon sur cette période. A ce demander pourquoi dans un tel contexte, cette embellie ne se ressent pas sur le vécu de ces populations, car le taux chômage officiel frôle toujours les 30% de la population active. Sur la même lancée, l’homme a indiqué avoir construit plusieurs infrastructures dont notamment 1 400 km de routes bitumées. Chacun, en cette période de grande saison sèche propice aux migrations vers l’intérieur du Gabon, pourra juger de la réalité de cette annonce. A ce sujet, en juillet et août 2015, dans deux numéros horssérie - le dernier est encore en vente dans vos kiosques à journaux-, votre journal avait abordé cette question sans complaisance. Le constat fait sur le terrain dément totalement les affirmations d’Ali Bongo Ondimba làdessus. Il faut dire que le chef de l’Etat a voulu lancer une opération de séduction en direction du peuple gabonais, en annonçant solennellement qu’il renonçait à sa part d’héritage au profit d’une fondation dédiée à la jeunesse. Tout comme, en accord avec toute sa famille, « il a décidé » de donner à l’Etat la propriété familiale du quartier Charbonnages de Libreville et deux hôtels particuliers situés à Paris. Un vrai gag qui ne résistera pas longtemps à la réalité.
En tant que légataire universelle de la succession Omar Bongo Ondimba, Ali Bongo Ondimba doit s’attendre à recevoir près de 190 milliards de FCFA d’héritage, à en croire les conclusions de Me Rolongoué, la première notaire qui s’est occupé de cette succession. Sauf que pour l’heure, ce dossier fait l’objet d’une procédure judiciaire engagée en France par l’un des héritiers. A moins d’être devin, le chef de l’Etat ne peut pas, pour l’heure, savoir l’issue de cette procédure. Ni la durée que va prendre cette bataille judiciaire. En toute logique, il aurait dû attendre de recevoir sa part d’héritage, avant de la léguer à l’Etat Gabonais. En agissant comme il le fait, Ali Bongo met la charrue avant les bœufs. Quant au legs de deux hôtels particuliers de Paris, le chef de l’Etat n’ignore pas que ces biens, ainsi que plusieurs autres résidences huppées que sa famille possède en Côte d’Azur, font l’objet d’une procédure judiciaire en France. Dans le cadre de l’affaire dite « des biens mal acquis». Ce sont des immeubles qui sont cités dans ce dossier judiciaire comme éléments de preuve. A ce titre, ils ne peuvent pas changer d’affectation avant la fin de cette procédure judiciaire. Venir annoncer dans ce contexte que sa famille et lui-même ont décidé d’en faire don à l’Etat Gabonais est sans aucun doute une insulte à l’endroit du peuple gabonais. Sauf à croire que, par ce jeu de passe-passe, l’action judiciaire sera stoppée en France. Il va en déchanter et réviser ses cours de droit pénal pour s’en convaincre. Ali Bongo Ondimba était attendu sur un tout autre plan, qui engage l’avenir immédiat du pays, à savoir le dialogue politique inclusif. Il est resté muet sur cette question cruciale, renvoyant les acteurs politiques au très inutile Conseil national de la démocratie (CND). Il a préféré vendre des mensonges et léguer à l’Etat Gabonais une fortune qu’il ne possède pas encore ou qui est mise sous séquestre de la justice française. C’est sans aucun doute ce comportement autiste qui va accélérer sa chute.
TEXTE - ARTHUR PAGE